Episode Transcript
[00:00:02] Speaker A: Lier, c'est construire, maintenir, unir les éléments de l'appareil psychique et du rapport au monde. Délier, c'est rompre, désagréger, isoler jusqu'au silence, au morcellement ou à l'acte violent. Liaison et déliaison sont en tension permanente, comme nous l'a rappelé le crash de l'A320 de Germanwings. Vous écoutez. Après coup, qu'est-ce qui était plus parlant comme métaphore des concepts de liaison et déliaison que des crashes d'avion? L'idée étant, dans nos deux premiers épisodes portant là-dessus, celui-ci étant le troisième et dernier, l'idée étant que c'est tout un système un tas de personnes, un tas de machineries sophistiquées qui convergent au service du déplacement d'un avion d'un point A à un point B. C'est énorme tout ce qu'il faut mettre ensemble et faire tenir ensemble pour pouvoir arriver à cet exploit-là.
Quand ça marche pas, pis que la vie on tombe, c'est tout aussi impressionnant la décomposition qui vient avec.
[00:01:55] Speaker B: Oui, d'où l'illustration de Liaison des liaisons, oui tout à fait.
[00:01:58] Speaker A: C'est ça.
[00:01:59] Speaker B: Ouais. Pis donc comparativement à ce qu'on fait, à ce qu'on a fait souvent, pis aujourd'hui, le cas, parce qu'on va parler de deux cas, dont de Andreas Lubitz qui a... qui a crashé un avion avec 150 personnes dedans. Mais ce n'est pas tant notre propos d'explorer les différentes possibilités. Mais l'autre fois, c'était un peu ça. Là, c'est vraiment moins ça, dans le sens qu'il n'y a pas de controverses. Il n'y a pas tant de controverses par rapport à ce qui est arrivé. Ce qui est arrivé, c'est assez limpide.
[00:02:34] Speaker A: Mais ce qui est intéressant d'explorer, c'est quelque chose dont on n'a pas parlé encore, c'est la psychose. Parce que les deux cas qu'on a retenus là, il y a quelques cas dans l'histoire de l'aviation civile, commerciale, quelques cas, c'est rare, il sim d'abord un accident d'avion, il faut le dire. pour me rassurer. C'est rarissime et c'est encore plus rare un accident d'avion qui est causé volontairement par une action du pilote. Donc on a parlé du vol Malaysia Airlines 370 qui est toujours pas élucidé, qu'on soupçonne le pilote d'avoir causé. Puis on a parlé des soupçons qui pèsent sur un des pilotes d'Air India, le vol 171, qui s'est écrasé récemment en Inde. Ils avaient chacun leur particularité.
[00:03:34] Speaker B: Oui, leur couleur.
[00:03:36] Speaker A: Il y a eu des passages à l'acte agressifs. On n'en parlera pas, je pense, parce que c'est... que ce soit un avion ou que ce soit autre chose, quelqu'un qui passe à l'acte par vengeance ou sur un coup de colère, c'est la même chose. On en a parlé sur... à propos de plein d'autres choses. Une décompensation psychotique dans le cockpit, c'est dans le plus rare des rares des rares de ce qui peut arriver. Et c'est intéressant dans ce cas-ci parce que ça nous permet de parler de la psychose. C'est quoi la particularité?
d'un accident qui est causé par quelqu'un qui est en décompensation psychotique dans un cockpit.
[00:04:19] Speaker B: Oui, puis c'est quand même un thème dont on jase pas tant que ça dans la vie courante. C'est-à-dire que même, on va le voir, même dans ce cas-là, Souvent, l'angle qui est pris, c'est, bien, est-ce que les gens reçoivent les bons soins pour leurs conditions, d'une façon générale? La mécanique de la condition, de ce que c'est, de ce que ça représente, de comment ça se déclenche, tout ça, c'est compliqué, là. On parle juste de, il avait-il été rencontré? Est-ce qu'on aurait pu prévenir comment le rencontrer plus vite? C'est facile d'enlever l'aspect plus...
toute la liaison et déliaison autour de la maladie, puis de parler juste des soins de santé en général, des affaires plus larges, parce que c'est moins épeurant, ou une expertise pointue, je ne sais pas trop.
[00:05:11] Speaker A: Oui, puis en fait, on dirait que la psychose aussi, depuis quelque temps, elle n'intéresse pas grand monde dans l'idée de la recherche du fonctionnement plus en profondeur, des causes, de la recherche de nouveaux traitements. Ce n'est pas une priorité et ce n'est pas quelque chose, comme tu dis, dont on parle souvent, en fait.
[00:05:42] Speaker B: Puis il y a aussi une raison pour ça aussi, je pense, c'est qu'à partir du moment où pour quelqu'un qui ne connaît pas ça plus qu'il faut, qui fait juste lire ça dans les journaux, où son idée, plus ou moins articulée, c'est que, dans le fond, on a tous des transmetteurs, puis des neurotransmetteurs, puis avec de la sérotonine, puis tout ça, puis que des fois, il y en a trop ou pas assez, puis c'est à cause des... – Qu'ils se touchent. – Oui, puis c'est à cause des équilibres qui peuvent amener de la psychose.
Il faut le savoir, il faut le traiter, il faut donner le bon médicament. Il n'y a pas tant d'affaires à explorer. Ce que la personne vit, ce que la personne dit, ce n'est pas de sa faute, c'est un truc de neurotransmetteur. Que ce soit juste ou non, trop grossier ou résumé ou non, ça n'amène pas une exploration fine de ce qu'il a écrit ou ce qu'il a dit avant, ça n'a pas d'importance.
[00:06:33] Speaker A: Oui, tout à fait.
Fait que là, on a les deux cas qui ont retenu notre attention, puis qui sont les seuls à ma connaissance. On va parler peut-être rapidement du premier, c'est-à-dire celui dont on connaît le moins, puis qui illustre peut-être un petit peu ce qu'on dit là, dans le fait qu'on en connaît le moins, c'est qu'il a été finalement diagnostiqué schizophrène paranoïaque. Donc, c'est une psychose avérée. Le pilote s'appelle Seiji Katagiri. C'est un pilote japonais qui a... qui avait des antécédents psychiatriques, mais pas identifiés comme tels. On sait pas. Est-ce que c'était une dépression? Est-ce que... Bon, les autorités sont discrètes là-dessus. Qui, malgré ses antécédents psychiatriques, On ne parle pas d'antécédents de problèmes psychologiques. On parle d'antécédents psychiatriques dans le sens médicalisé. Est-ce que c'est parce que c'est les psychiatres qui sont responsables des évaluations psy? Est-ce qu'on ne sait pas vraiment le détail?
Mais une journée en 1982, c'est lui qui est aux commandes d'un vol qui part d'un vol interne au Japon, d'un Boeing 747 avec 174 personnes à bord. Ce qu'il fait dans un premier vol, c'est qu'à un moment donné, au cours du vol, Il met ses commandes à reculons, en plein vol, ce qui est ultra dangereux parce que là ça, ça peut entraîner une spirale, l'avion à spiraler puis à juste tomber. Heureusement, le copilote s'en rend compte tout de suite, répare l'affaire et le vol finalement atterrit sans problème. Le lendemain, Il refait la même chose. Et là, sur ce coup-là, ça prend quatre personnes pour essayer de l'arrêter. Et malgré ça, tout ce qu'ils ont réussi à faire, c'est éviter le pire de la catastrophe. L'avion a crashé. Il y a eu quand même 150 survivants, mais c'est quand même un crash d'avion, 24 morts. Au terme de l'enquête, ce qu'on apprend, puis c'est tout ce qu'on apprend, c'est que le capitaine Katagiri, et schizophrène paranoïde. Et donc, il est comme disculpé, pas disculpé, mais... Non-responsable. Non-criminellement responsable. Et depuis ce temps-là, il vivote tranquillement dans une maison. Il n'est pas mort non plus d'un accident. Ça, c'était juste...
pour indiquer qu'il y avait eu un autre cas, à part celui qui va nous occuper plus, parce que celui-là, on en a parlé beaucoup, beaucoup, beaucoup, en Europe, parce que ça a été traumatisant, en fait. C'est le crash du vol de la German Wings en 1900, en 2015, qui est beaucoup plus récent.
[00:09:57] Speaker B: Oui, donc c'est ça. Andreas Lubitz, le 24 mars 2015, c'est le copilote d'un vol. Moi, ce que j'en ai compris, tu me corrigeras. Pendant le vol, à un moment donné, le pilote dit, je vais aller à la salle de bain. C'est assez prosaïque, mais c'est correct. Il dit, oui, parfait. Donc, le pilote quitte. La porte se barre automatiquement, ou lui, la barre. Et presque immédiatement, donc après le départ du pilote, Andreas Lubitz commence à faire descendre l'avion vertigineusement, rapidement, à sa part, de 30 000 pieds d'altitude à quelques centaines. Il descend. Et donc, les gens nécessairement dans l'avion le sentent. L'avion tombe et le pilote revient. Ça se met à frapper dans la porte pour qu'il ouvre. Puis lui, il reste calme. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de cris, il n'y a pas de justification. On le sait dans l'après-coup avec la boîte noire, sa respiration est assez neutre. Alors les gens tapent dans la porte.
[00:11:15] Speaker A: Pour dire... – C'est ça qu'on entend sur la boîte noire, où c'est le capitaine qui frappe sur la porte.
[00:11:20] Speaker B: – Exact. Puis il reste stoïque, c'est-à-dire qu'il ne proteste pas, il ne dit rien, il n'y a pas de parole, il n'y a pas de mots. Puis l'avion crache dans les Alpes, entraînant la mort de tout le monde en fait. Ce qui représente 149 ou 150 personnes?
[00:11:34] Speaker A: – 150 personnes.
[00:11:34] Speaker B: – 150 personnes.
[00:11:35] Speaker A: – 149 personnes plus lui, en fait, c'est ça.
En fait, pourquoi on parle de psychose juste rapidement, c'est que ce n'est pas avéré que cette personne-là était dans un épisode psychotique. Ce n'est pas un diagnostic établi.
Par contre, ce qu'on sait, c'est que dans les mois qui ont précédé ce passage à l'acte-là, il a consulté 40 fois à peu près des médecins. Il y avait un diagnostic de dépression. On lui prescrivait des antidépresseurs, mais ça n'allait pas mieux. Il était convaincu de ne pas voir 30% des objets. Il était convaincu qu'il était en train de devenir aveugle, en fait.
[00:12:34] Speaker B: Je t'arrête juste pour dire que quand c'est arrivé, évidemment, la première réaction, c'est que c'est un drame, puis tout le monde se recueille, puis les familles, tout ça. C'était un avion commercial, alors il y avait toutes sortes de mondes, toutes sortes de places. Après ça, c'est toutes les tragédies humaines que tu apprends, les nouveaux mariés...
[00:12:52] Speaker A: La chanteuse, une cantatrice connue... Oui, c'est ça.
[00:12:56] Speaker B: Mais par contre, rapidement... Sauf erreur, il n'y a pas eu tant de doute par rapport à si c'est un motif politique ou terroriste, il n'y a pas de conspiration, il n'y a pas de différents niveaux de compréhension. La boîte noire indiquait que ce que j'ai décrit, c'est-à-dire que c'est le copilote qui a fait crasher l'avion.
[00:13:14] Speaker A: C'est ça, ils l'ont trouvé très, très vite. Parce que c'est un carnage. Le gars, il est descendu, donc il est passé de 30 000 pieds à 100 pieds. 100 pieds, en fait, il a seté son... les réglages de la hauteur de vol et de la vitesse de vol, de 30 000 pieds à 100 pieds, et c'est 100 pieds au-dessus du niveau de la mer.
Et donc, ça veut dire en dessous de la Terre, puisqu'ils sont au-dessus des Alpes.
[00:13:45] Speaker B: Oui, oui, oui, oui.
[00:13:46] Speaker A: Et là, il descend. Au début, il descend tranquillement. C'est rapide, mais c'est pas ressenti très fort. C'est une descente de 4 degrés, je pense, qui est à peine, on dit, 1 degré de plus qu'une descente normale d'atterrissage. Donc, 4 degrés. Ça a duré 10 minutes, l'affaire. La seconde où le capitaine est sorti, Il a fait ses réglages. Dans les secondes qui ont suivi, il a bloqué la porte. Il a fait ses réglages. Et là, l'avion a descendu en continu et accéléré jusqu'à cracher dans la montagne. Ce que les premiers secours ont vu, c'est... Comme une des personnes disait, c'est que l'arrière est rentré dans le nez. L'arrière de l'avion est rentré dans le nez. C'est un carnage. C'est des morceaux de tout disperser partout, il n'y avait plus rien. Même les moteurs étaient réduits en miettes, ça a été pulvérisé cet appareil-là. Mais on a trouvé rapidement, heureusement...
[00:14:52] Speaker B: L'ultime des liaisons, c'est un peu ce que tu disais tantôt par rapport à toute la mécanique précise qui fait en sorte que tout doit être en place à chaque étape pour faire voler cette affaire-là.
[00:15:01] Speaker A: L'expression qu'il employait dans un des documentaires, c'est ça, pulvérisé, c'est-à-dire totalement morcelé. Totalement morcelé. C'est impressionnant à voir. Puis, en fait, pour faire l'enquête, d'abord, il faut identifier les priorités, identifier les victimes et les rapatriés. Mais c'était hyper complexe parce que là, t'as pas nécessairement tout ce dont t'as besoin pour identifier rapidement les victimes. Mais heureusement, donc la boîte noire, les deux boîtes noires, ont montré, heureusement pour l'enquête, pas heureusement pour les gens, parce que ça a été un deuxième traumatisme. Tout ce que les témoins semblent en avoir dit. D'apprendre que c'était volontaire. La boîte noire te permet d'entendre ce qui se passe dans l'avion pendant les dix minutes de cette descente-là. Et donc, le pilote, qui est enfermé dehors, hurlait sa vie pour essayer de rentrer dans le cockpit, pendant que l'autre ne fait que respirer. Et on entend clairement sa respiration calme, semble-t-il, jusqu'à sept secondes avant la collision avec la montagne.
[00:16:17] Speaker B: Mais donc nécessairement l'enquête, pas nécessairement mais à cause de ce qu'on décrit assez rapidement, toutes les hypothèses d'actes terroristes ou d'agents doubles ou d'actes politiques, tout ça a été pas mal écarté d'emblée parce qu'il n'y avait rien aussi dans dans le passé d'Andreas Lubitz, qui montrait qu'il était associé avec tel groupe et qu'il avait telle volonté politique de faire telle chose. Alors, donc, rapidement, la question, ça a été, bien, qu'en est-il de son état mental, de son état psychologique? Puis, est-ce qu'on aurait pu le détecter plus vite? Qu'est-ce qui est arrivé? Pourquoi il a pu aller voir tant de médecins sans qu'on le sache? Puis, pour la suite, comment on peut faire en sorte de mettre en place des mesures pour que jamais des pilotes en si mauvaise posture mentale puissent piloter. On ne l'a peut-être pas dit, il y a eu... C'est un jeune homme, il avait 27 ans. Fait que c'est un jeune homme. Puis il y avait eu un épisode dépressif plus tôt dans sa vie, il y a quelques années, pendant ses études où il devenait pilote, qu'il avait fait donc interrompre ses études.
[00:17:25] Speaker A: Fait que c'est un épisode dépressif grave. Si t'arrêtes tes études, c'est pas les blues que t'as là.
[00:17:33] Speaker B: C'est ça. ça s'était résorbé, il avait repris ses études, il était donc revenu pilote et tout ça. Et donc c'était, de ce que je comprends, corrige-moi, mais c'était comme le deuxième moment dans sa vie où il n'allait pas bien. La première fois, bien, pas bien. Il y avait clairement des suivis et tout ça. Donc la première fois, il y avait eu des antidépressants, il y avait eu des médicaments, c'était allé mieux, il avait recontinué ses études, il avait commencé à piloter, il avait commencé à piloter et là, quelques mois avant l'accident, ça n'allait pas et donc il était dans un quasiment une effervescence de recherche de psychiatre et de médecin, il y en a vu des dizaines.
[00:18:17] Speaker A: Oui, il a consulté 40 fois dans les 3 ou 4 mois.
Il est convaincu d'être en train de devenir aveugle. Donc il n'a pas juste consulté parce qu'il était déprimé, il a consulté parce qu'il ne voyait pas, il a consulté des ophtalmologistes, des neurologues, pour qu'on lui donne un diagnostic concernant sa vision. Parce que là, ça, c'est le rêve de sa vie, de piloter. Il pilote depuis qu'il est jeune. Il a fait du deltaplan. Sais-tu du deltaplan?
[00:18:52] Speaker B: Oui, c'est du deltaplan.
[00:18:54] Speaker A: Par-dessus les Alpes, dans sa jeunesse. Justement par-dessus l'endroit où il a crashé son avion.
Donc là, de commencer à se dire « mais là, je suis en train de devenir aveugle », ce que ça signifiait, c'était qu'il ne pourrait plus piloter.
Mais là, de se poser des questions sur, en fait, je suis en train de devenir aveugle, ça a mis la puce à l'oreille à certains médecins qui ont dit, ben non, mais vous êtes peut-être déprimé. Mais là, d'être déprimé, ça risquait de le mettre en danger de... De perdre sa licence. C'est ça. Et là, éventuellement, on lui a émis une ordonnance d'arrêt de travail.
théoriquement, il n'avait plus le droit de piloter d'avion. C'est juste qu'il ne l'a pas dit. et on le comprend.
[00:19:49] Speaker B: C'était son rêve.
[00:19:51] Speaker A: Ils ont retrouvé une ordonnance déchirée d'arrêt de travail. Quand ils sont allés, évidemment, ils ont perquisitionné chez lui, voir c'est qui cette personne. Mais qui n'a jamais été transmise aux autorités de la Lufthansa. Donc ça, ça se passe en Europe. Germanwings, c'est une filiale de Lufthansa. C'est l'OCAS, des vols à interne. C'est sur un vol de Barcelone jusqu'à Düsseldorf. Donc la Lufthansa n'a jamais eu connaissance de l'arrêt de travail, ni de ses préoccupations physiques, parce qu'elle n'a pas consulté les médecins de la compagnie. Mais on le comprend.
Parce que c'est comme les médecins de la compagnie, on le comprend dans le sens où les médecins de la compagnie, ils sont intéressés à ce que leurs pilotes soient en santé, certainement, mais leur préoccupation, c'est aussi que ce soit sécuritaire pour les passagers que l'état du pilote. Fait que là, si un médecin de la compagnie dit « mais ce monsieur-là, il n'est pas en état », c'est automatiquement la fin pour lui.
[00:21:03] Speaker B: Ou en tout cas une pause pour un bout de temps.
[00:21:05] Speaker A: Une pause jusqu'à preuve de récupération.
[00:21:31] Speaker B: Mais là, moi, ce qui m'a frappé, par exemple, c'est que... puis c'est peut-être pas lié exactement au thème de liaison et déliaison, mais encore, quand il y a un accident d'avion, on en a parlé les premières fois, puis on est impressionné par ça, puis ça a un aspect...
rassurant dans un sens, c'est que beaucoup, beaucoup de gens font un effort concerté et calme, scientifique et objectif pour dire, mais qu'est-ce qui s'est passé?
[00:21:58] Speaker A: Oui, pour arriver à la vérité. Oui. Oui, on veut savoir.
[00:22:00] Speaker B: Là, d'un coup, il y a une espèce de neutralité. Ce n'est pas une question de droite, gauche. Non, non, non.
[00:22:06] Speaker A: C'est ça.
[00:22:06] Speaker B: Qu'est-ce qui est arrivé?
[00:22:07] Speaker A: Oui.
[00:22:07] Speaker B: On part tout de notre connaissance de l'avion, de la mécanique de l'affaire. Puis là, il y a différentes hypothèses parfois. Dans ce cas-ci, c'est assez clair, mais des fois, il y a différentes hypothèses. Est-ce que ça se peut qu'il y a eu une secousse due à l'environnement, puis le moteur dans le truc?
[00:22:25] Speaker A: Mais tout est mis en place pour invalider toutes les hypothèses qui ne marchent pas et arriver Si ce n'est pas la conclusion définitive, c'est-à-dire la preuve hors de tout doute, c'est l'hypothèse la plus plausible. Comme dans le cas de Malaysia Airlines. C'est-à-dire l'hypothèse la plus plausible, c'est que le pilote a tout orchestré pour faire disparaître son avion. Il y a des gens qui n'y croient pas, mais tous les efforts ont été mis pour éliminer les hypothèses concurrentes.
[00:23:05] Speaker B: Puis ce qui est plaisant dans cet exercice-là pour moi, pour toi aussi je pense, il y a des ratés comme de raison parce qu'il y a des humains, puis il y a des agendas politiques, puis il y a toutes sortes d'histoires. Mais quand même souvent, il n'y a pas tant de partisanerie. C'est-à-dire que même si tu fais une hypothèse, mais tu es tout à fait correct avec l'idée que ton hypothèse soit réfutée, ce n'est pas grave.
ton hypothèse pour ta gang que tu veux qu'il gagne. Puis tu sais, c'est un problème dans la vie, en passant, c'est un aparté je pense qui est notable de dire, c'est que des fois, tu as quelqu'un qui tente de te convaincre ou même juste qui t'énonce son idée, puis il t'explique son point de vue, puis ok, ouais, j'avais pas vu ça comme ça. Mais à un moment donné, tu te rends compte que c'est pas tant qu'il y croit, c'est qu'il croit en la cause, et que la cause est tellement importante que c'est pas grave qu'ils te montrent sur ce qu'ils te racontent pour que tu te rallies à la cause. Fait que finalement, c'est une affaire de partisannerie. Fait que là, finalement, OK, mais là, ça change tout, tu sais. Si tu essaies de me convaincre qu'il est arrivé quelque chose que tu sais qui est une supercherie, mais pour que j'embarque dans ton truc, pour que je vote du même bord que toi, là, c'est de la partisannerie, là. OK, mais c'est un autre niveau. Bref, c'est un autre débat.
[00:24:19] Speaker A: Parce que c'est vrai en politique, mais c'est vrai en santé publique aussi. C'est vrai dans tous les domaines, en fait. C'est que ta théorie, ta conviction, tient lieu de savoir. Et t'as pas besoin de plus. Une fois que tu penses que tu sais, c'est établi que tu sais. Et la preuve que tu sais, c'est que t'es un expert. Ce qui fait que les nouveaux faits ou les faits qui concordent pas avec ta conviction peuvent te rebondir dessus. Tu peux juste les ignorer, tu peux juste ne pas aller voir.
[00:24:59] Speaker B: Oui, ne pas vouloir savoir.
[00:25:01] Speaker A: Parce que t'as une conviction qui te donne aussi un statut. Oui. Ce qui est rassurant, c'est ça, dans des cas d'investigation, comme tu disais, sur des crashes, c'est de dire, mais en.
[00:25:15] Speaker B: Fait, Tu n'es pas mariée à ton hypothèse.
[00:25:19] Speaker A: – On ne peut pas se permettre de se chicaner ou d'inventer des clochers. Nous, ce qu'on veut savoir, moi, Boeing, je veux savoir si c'est ma faute à moi ou si c'est la faute à General Electric.
[00:25:28] Speaker B: – C'est ça. C'est le moteur ou c'est le pilote?
[00:25:30] Speaker A: – C'est qui qui va payer, là?
[00:25:31] Speaker B: – Oui, c'est ça.
[00:25:31] Speaker A: – Puis ma réputation est en jeu, là.
[00:25:33] Speaker B: – Oui, exact.
[00:25:34] Speaker A: – Puis là, bon, ils sont plusieurs aussi. Il y a plusieurs intérêts. À ma connaissance, sans collusion ou trop, on ne sait pas.
[00:25:42] Speaker B: – C'est sûr qu'il y a de la névrose, mais il y a quand même un effort de trouver la vérité.
[00:25:46] Speaker A: Oui. Oui.
[00:25:49] Speaker B: Et donc pas la parcelle de vérité qui va être la meilleure pour ton camp.
[00:25:53] Speaker A: Non. Puis il n'y a pas de bonne réponse non plus dans le sens où, tu sais, il y a des pilotes qui disent, mais en fait, on va trop rapidement accuser le pilote en premier. La vérité, c'est que la plupart des pilotes sont parfaitement compétents, tu sais. Bon. Ça fait que ce n'est pas juste de...
Ce n'est pas ce que j'ai compris personnellement. Peut-être que les pilotes le vivent comme ça, mais ce n'est pas mieux pour une entreprise d'accuser le pilote que l'entreprise engagée.
la compagnie aérienne n'a pas intérêt à accuser le pilote puisque c'est elle-même qu'elle accuse. Tu sais? Fait que... Puis quand on apprend que c'est le pilote, une erreur de pilotage, c'est une chose, une incompétence. Il y a eu une bataille à un moment donné, une chicane dans un avion qui a fini en crash, en fait. Le pilote éco-pilote est en désaccord, puis ça se chamaillait dans le cockpit. En tout cas, c'est arrivé, mais ça reflète mal.
sur la compagnie. C'est pas juste le pilote, c'est l'entreprise. Donc, on l'a déjà dit, mais ça vaut la peine de leur dire, il y a des intérêts en... Oui, des.
[00:27:09] Speaker B: Intérêts en jeu avec beaucoup d'argent.
[00:27:10] Speaker A: C'est ça. Puis tout le monde veut pouvoir dire, c'est pas de ma faute à moi. Donc, on veut aller au fond des choses, en fait, pour démontrer que c'est pas de ma faute à moi. C'est pas ma compagnie. Moi, mes moteurs sont parfaits.
[00:27:20] Speaker B: C'est ça. Mais là, en même temps, c'est plus dur aussi, par définition, de tirer la couverte de son bord parce qu'il y a un moment dans l'espace et dans le temps très précis où il s'est passé quelque chose. On parle pas d'un concept théorique où on dit, ah bien regarde, moi, ma vision politique va amener mais là on patauge dans une sorte d'affaire. Non, non, c'est parce que, regarde, le boulon était défait, puis c'était ta job à toi de le vérifier, ça fait qu'on est assez spécifiques.
[00:27:44] Speaker A: Tu n'as pas acheté les bons boulons. Tu as acheté les boulons cheap.
[00:27:46] Speaker B: Puis des fois...
[00:27:47] Speaker A: Il fallait les boulons de compagnie.
[00:27:48] Speaker B: Oui, c'est ça. Mais là, je reviens sur des liaisons, des liaisons. Je sais que ce n'était pas ça de notre perspective, mais pareil, ça en est une. Tu sais, d'autres fois, je te disais ça, hors podcast, que c'est ce qu'on aime faire dans le podcast, l'espèce d'obsession qu'on a dans un sens, c'est de...
de ne pas se prendre à juste avoir une ligne de pensée, puis c'est celle-là qu'on tambourise tout le temps, puis voici ce qu'on pense, parce que c'est notre camp, c'est notre gang. Mais d'au contraire, des fois, se voir surpris par un point de vue différent qui vient défaire. Fait qu'il y a de quoi aussi autour de ça. Tu sais, c'est tentant dans la vie de lier des affaires, puis que ça soit tout tight, tu sais, ta valeur, ton point de vue, ta pensée, puis de... Tu sais, on parle de dissonance cognitive des fois, mais on pourrait parler de déliaison. C'est en tant que pas vouloir délier ça, puis de trouver l'ératage, puis de rester dans... Non, non, non, c'est ça que je pense. Puis tu le vois des fois physiquement, non?
Il y en a des gens, puis je ne me souviens pas de ça. Des fois, tu sais, physiquement, tu crois en quelque chose, puis tu as ton idée, puis là, il y a quelque chose qui arrive dans la vie qui vient ébranler tes convictions. Puis on voit des fois, physiquement, les gens... C'est comme quasiment un robot qui disjoint, tu sais, ils ont de la... mais là comme de raison, je ne bouge pas mes expressions, mais tu sais, il y a comme des tics qui arrivent parce que comment je peux concilier cette affaire-là qui compte ce que je voulais, mais là c'est vrai que... Mais ce qu'on veut faire dans le podcast des fois, c'est pour ça que, tu sais, rarement on arrive en disant, on avait une hypothèse puis on veut vous prouver que c'était la bonne, puis on fait juste le démontrer tout le long en disant... d'autres preuves qu'eux. Au contraire, c'est quasiment tout le temps des fois, mais en même temps, t'as-tu pensé à telle affaire qui vient tout défaire. Ça fait que ce concept-là de liaison, déliaison aussi, personne ne veut être dans la déliaison totale tout le temps, mais il y a un intérêt à ne pas nouer trop serré.
[00:29:53] Speaker A: Oui, c'est ça. Il faut que ça circule, il faut que ce soit en... pas il faut, mais c'est comme ça, en fait. C'est en tension permanente. Le compost... Ton arbre pousse et il grandit, puis arrive l'automne, les feuilles tombent. se décompose, donc se délit. Et ce qui est libéré se mêle à la terre et la nourrit pour faire pousser ton petit bébé arbre qui naît de la graine qui est tombée avec les feuilles. C'est comme le cycle de la vie. Mais il y a des choses, par contre, si je peux faire un segway, des choses, par contre, qui doivent rester assez structurées pour éviter la psychose.
[00:30:49] Speaker B: Oui.
[00:30:51] Speaker A: La psychose, il y a toutes sortes de théories, justement, pour la définir, la décrire, mais en fait, on peut l'observer, on le sait. Quand une personne est psychotique, On le sait, ça se voit, tout le monde le sait. Pas tout le temps, mais la plupart du temps. C'est une maladie très bien définie, très bien... On sait depuis longtemps, en fait, comment la décrire. Une des caractéristiques de la psychose, c'est la peur du morcellement.
Il y a quelque chose de... du morcellement du corps, mais il y a aussi le morcellement de la pensée. Donc, tu peux avoir une discussion avec une personne qui est schizophrène et qui te dit des mots, les uns après les autres, sans que t'arrives à comprendre qu'est-ce qu'il te dit, parce qu'il y a rien qui lie les mots entre eux. C'est-à-dire que c'est une suite de mots sans liant.
[00:31:55] Speaker B: C'est ça. Exact.
[00:31:57] Speaker A: Puis là, je pense que c'était le... Parlant de métaphores, t'as quelqu'un dans un cockpit qui est peut-être en décompensation psychotique et qui s'en va morceler son avion, en fait. C'est-à-dire, c'est comme si son avion...
illustrait, était le prolongement de son état intérieur, d'une certaine façon. Peux-tu le dire comme ça?
[00:32:24] Speaker B: Oui, oui, non, bien, c'est une hypothèse, certainement. Surtout dans l'idée où, comme tu dis, on le voit parce que c'est un signe externe des gens en décompensation psychotique, justement, ils parlent à la cantonade, ils se parlent à eux-mêmes, il n'y a pas de lien entre les mots qu'ils disent. Fait qu'il y a quelque chose de symboliquement, on dirait qu'ils ne tiennent pas, qu'ils ne rattachent pas, tu sais, qui fait en sorte que, justement, c'est lié. Puis à cause de ça, on peut dire, ça fait souvent en sorte qu'il y a une espèce de menace externe qui plane, mais qui est comme internalisée aussi. Ça fait qu'ils ont peur de quelque chose.
[00:32:56] Speaker A: Oui. Oui.
[00:32:58] Speaker B: Il y a quelque chose de ce genre-là aussi. On leur en veut. On va leur enlever quelque chose.
[00:33:02] Speaker A: On veut les tuer.
Puis lui, en fait, pourquoi le soupçon de dépression psychotique, c'est ce que le médecin qui a posé ce diagnostic-là ou cette hypothèse diagnostique-là signifiait, c'était qu'en fait, c'est mon hypothèse, c'est mon impression, mon hypothèse informée, disons, ce que j'ai l'impression de lire entre les lignes, c'est qu'en fait, La peur de perdre la vue qui commençait à le tenailler sérieusement et à le déprimer, parce que là il avait peur de perdre sa job et tout ça, c'est probablement une conviction délirante.
[00:33:47] Speaker B: Oui, c'est ça.
[00:33:49] Speaker A: On a tout essayé. Il n'y a pas de problème physiologique qu'on peut voir.
[00:33:53] Speaker B: Oui.
[00:33:54] Speaker A: Mais il continue à être certain qu'il est en train de devenir aveugle.
[00:33:57] Speaker B: Oui.
[00:33:59] Speaker A: C'Est une conviction délirante. Il y a ça dans la psychose.
[00:34:04] Speaker B: Mais, donc, trouves-tu, moi, une affaire qui m'a un peu... une déception, dans un sens, c'est que, donc, d'un côté, quand il y a des accidents d'avion, il y a ce qu'on disait tantôt, là, une espèce de... de volonté sérieuse et concertée de dire, bien là, on va trouver la végété, on va voir, on va exploquer ce qui est arrivé, puis on va avoir différentes hypothèses, puis on va être content de dire, bien non, tu vois, celle-là, c'est pas la bonne.
[00:34:29] Speaker A: Ça marche pas.
[00:34:30] Speaker B: Ça fonctionne pas. Fait que regarde, on passe à l'approche. Ce qui est très scientifique comme approche.
[00:34:34] Speaker A: Bien oui.
[00:34:34] Speaker B: Il n'y a pas de problème. Tu as une hypothèse, puis tu penses que c'est ça, puis tu essaies de trouver des preuves, puis à un moment donné, bien, les faits font que ça tient pas. Bon, tu passes à l'autre hypothèse. Puis, tu peux même dans l'après-coup dire, ben voici les huit hypothèses qu'on a explorées, puis voici pourquoi la numéro 3, 4, 6, ça n'a aucun sens. Mais là, ça se peut que la première et la deuxième, on est encore hésitants, mais si on pouvait avoir telle info, on pourrait le savoir. Puis là, tu continues. Mais donc, ma déception, c'est pourquoi on ne peut pas avoir la même rigueur et faire une espèce d'autopsie psychologique de ce qui est arrivé? au coup pilote. Puis je comprends la gêne, parce que bon, c'est une personne, puis un aspect de la vie privée et tout ça, mais je ne dis pas de rendre ça nécessairement public, mais pourquoi il n'y a pas des gens qui ne peuvent pas quelques semaines après dire, on veut faire une autopsie psychologique, donc voir comment il était avant, qu'est-ce qu'il disait, qu'est-ce qu'il a écrit, qu'est-ce qui est arrivé. Mais toutes les questions qu'on se pose là, puis celles que tu posais à Étabonne, qu'est-ce que l'avion peut représenter, le morcellement, est-ce que c'est un reflet de ce qu'il vivait, puis... Puis de toutes se poser ces questions-là pour pouvoir arriver à un moment donné le plus proche possible peut-être d'une certaine vérité qui pourrait après influencer plein d'autres choses. Mais souvent, il y a un escamotage de tout ça pour passer à des conclusions rapides. La prochaine fois, il faut faire telle chose. Il faut mettre telle mesure en place. Puis un n'empêche pas l'autre. Éventuellement, tu peux avoir des mesures.
Il n'y a pas manifestement cette rigueur-là, cette décision de dire avant de passer aux actions et aux mesures, on va prendre le temps d'explorer différentes hypothèses pour comprendre ce qui s'est passé. Dans ce cas-là, ça a été très peu fait.
[00:36:30] Speaker A: Oui, oui. Finalement, il y a eu 40 médecins, ils étaient malades. Aucun des médecins n'a voulu parler aux enquêteurs, ils ont le droit. En Allemagne, c'est tellement... comme un peu partout, mais quand même beaucoup plus, tellement ancré le respect de la confidentialité que les médecins ne vont pas spontanément s'ouvrir sur ce que... Et les parents d'Andreas Lubitz me veulent pas parler non plus. Donc, il y a un défaut d'information, mais aussi, il semble pas y avoir eu un désir d'aller plus loin, en fait. C'est comme si de dire... Il prenait des antidépresseurs, donc il était malade, donc il n'aurait jamais dû voler.
c'était suffisant, en fait.
[00:37:25] Speaker B: C'est ça. Et oui, c'est comme si aussi même poser l'hypothèse qu'essayer de comprendre quoi que ce soit serait de toute façon spéculatif et à quoi bon.
[00:37:35] Speaker A: C'est ça. Puis aussi, c'est qu'en fait, c'est peut-être le territoire inexploré, le continent noir, parce qu'on ferait pas ça sur un problème mécanique. C'est ça, on s'arrête. Ce qu'il veut dire, on s'arrête. On s'arrête d'aller plus loin.
[00:38:07] Speaker B: C'est ça. Mais parce que... Là, j'en arrive à mon punch, mais je ne sais pas si c'est un punch pour toi aussi, mais... Parce que dans la psychose, il Tu parlais tantôt y a des gens qui ne sont pas dans la psychose. C'est-à-dire qu'il y a des gens qui ne sont pas dans la psychose.
[00:38:17] Speaker A: C'est-à-dire qu'il y a des gens qui ne sont pas dans la psychose.
[00:38:17] Speaker B: C'est-à-dire qu'il qu'il y a des choses qui ne tiennent pas, qu'il n'y a pas un lien qui fait en sorte que la personne peut être dans un délire, entre autres, que les mots n'ont pas nécessairement de sens pour les petits autres autour de cette personne-là. Mais la fonction symbolique, la fonction paternelle, en fait, le père ou la fonction paternelle a une place assez bien précise dans la conception de la psychose de plusieurs auteurs.
[00:38:42] Speaker A: La fonction paternelle ou la loi ou la structure.
[00:38:47] Speaker B: – Oui. Et donc, je le dis parce que moi j'ai exploré ce cas-là, je ne l'avais pas entendu parler avant que tu m'en parles.
C'est intéressant et ce n'est pas intéressant parce que souvent moi ce que j'aime c'est de voir les différents points de vue, les différentes théories, c'est assez ce que c'est. Je lisais des articles et c'était vite assez répétitif parce que la boîte noire monte que... C'est sûr que ce qui est prenant c'est ce qui s'est passé dans la cabine de pilotage, tout ça, mais à savoir qu'est-ce qui est arrivé.
Fait que là, je lisais plusieurs articles, puis vraiment, c'était très, très répétitif. Puis là, à un moment donné, je tombe quasiment, en passant, mais pas quasiment, en passant, on sait que le copilote, avant l'accident, donc le 24 mars 2015, deux semaines avant, venait d'apprendre que sa blonde était enceinte de lui.
[00:39:42] Speaker A: Ah non! Non, je le savais pas, ça. Non, j'ai pas... Pour vrai? Non.
[00:39:51] Speaker B: Fait que c'était la même réaction que moi.
[00:39:53] Speaker A: Oui.
[00:39:54] Speaker B: Mais c'est sûr que ça peut avoir un impact, là.
[00:39:56] Speaker A: Mais oui.
[00:39:56] Speaker B: Il était séparé de sa blonde.
[00:39:58] Speaker A: Oui.
[00:39:58] Speaker B: Donc il y avait une séparation parce qu'elle, elle trouvait ça low, il était low. Fait que c'était séparé. Mais là, elle venait de raconter que c'était pas prévu, mais qu'elle était enceinte. Mais c'est sûr que ça peut avoir un impact.
[00:40:10] Speaker A: Tu dis deux semaines avant?
[00:40:12] Speaker B: Deux semaines avant l'accident.
[00:40:13] Speaker A: Puis ils se sont séparés depuis combien de temps? Parce que c'est trois ou quatre mois avant l'accident que les visites aux médecins commencent et s'accélèrent.
[00:40:25] Speaker B: Oui, je ne sais pas, mais peut-être que dans ce temps-là, c'était plus lourd. Parce qu'elle l'avait supportée, ils étaient ensemble depuis un bout de temps, puis elle avait vécu sa première dépression, mais à ce que je comprends, elle avait été très patiente et supportante, mais bon, il y avait des problèmes. Évidemment, peut-être qu'elle n'était pas facile à vivre avec tous ces problèmes-là.
[00:40:45] Speaker A: Mais je n'ai pas vu ça du tout, ni qu'il y avait une blonde, ni rien de ça. Dans rien de ce que j'ai vu.
[00:40:53] Speaker B: Puis non, c'est pas un petit poème noté. Moi je suis comme, ouais, ça change tout. Ça change tout encore là. Je comprends que certaines personnes qui nous écoutent pourraient dire, OK, mais de toute façon, on ne saura jamais. Puis c'est de la spéculation. Mais quand même, Je veux dire, encore là, c'est un principe. Si on fait une enquête, une vraie enquête sur ce qui est arrivé à l'avion, on enquête comme il faut. Puis on ne dit pas, le moteur, regarde, ce n'est pas grave. De toute façon, les moteurs, c'est des bons moteurs. On enquête toutes les facettes. Mais là, tu as le copilote, tu as sa santé psychologique, tu as son désordre, tout ça. Il vient d'apprendre qu'il va être père, ça devrait être dans l'équation de qu'est-ce que ça a fait pour lui. Mais... Hein? T'as compris?
[00:41:48] Speaker A: Mais oui. Est-ce que tu me dis ça? Puis je pense tout de suite à Schreiber. Tout de suite. Donc le président Schreiber, qui était président de la cour d'appel de Dresde à la fin du 19e siècle, je pense, a décompensé.
et a écrit ses mémoires, les mémoires d'un névropate. Et c'est des mémoires, à partir des mémoires d'un névropate, du président Schreiber, que Freud a commencé à élaborer un début de théorie de la psychose, et que Lacan a comme poursuivi, puis... il a comme mis ça au travail sérieusement, et mis en évidence la question de la métaphore paternelle. Il y avait un truc de...
En tout cas, je n'irai pas dans les détails parce que c'est très complexe. Il y a tout un séminaire d'une année complète là-dessus, les mémoires de Schreber chez Lacan. Mais c'est la métaphore paternelle, ce qu'on parle. Ce n'est pas juste...
La fonction du nom du père, c'est ce qui est censé te protéger de la psychose.
[00:43:01] Speaker B: Et sa forclusion, c'est ce qui peut la conduire.
[00:43:03] Speaker A: C'est la forclusion, exactement, c'est ça.
[00:43:05] Speaker B: Et dans...
[00:43:06] Speaker A: Quand le père... la forclusion, ça veut dire... l'oblitération, ça n'existe pas, c'est au dehors, c'est pas intégré, en fait.
[00:43:16] Speaker B: Ouais.
[00:43:17] Speaker A: Et quand ça réapparaît, là, le sujet est en danger de pas le supporter.
[00:43:24] Speaker B: Ouais. Et là, il vient d'apprendre qu'il allait être père.
[00:43:27] Speaker A: Oui.
[00:43:28] Speaker B: Mais puis juste pour préciser aussi, Freud et Lacan et plein d'autres, quand ils étudiaient le Koch-Reber, c'est qu'ils étudiaient aussi vraiment, dans le détail, tu te rappelles, on l'a étudié, les phrases qu'ils disaient, les mots qu'ils disaient, c'est de décortiquer un truc, un délire qui a l'air à ne pas faire de sens, mais de prendre le bout de phrase puis de dire, mais ça, ça se rapproche. Et donc, moi, j'accepte tout à fait, tu sais, c'est zéro trouble que quelqu'un dise, moi, ça m'intéresse zéro.
Ça m'intéresse zéro de décortiquer la signification potentielle d'un délai, de la place, de la fortellusion, du nom, ça m'intéresse pas. Puis c'est correct, il y a plein d'affaires qui ne m'intéressent pas non plus.
Mais c'est juste un principe de dire, est-ce que par contre, ça vaut la peine que certaines personnes s'en intéressent? On pourrait dire non. On pourrait dire non, on peut dire quand il y a quelqu'un qui est en décompensation psychotique, ce qui s'est passé dans sa tête, ce qu'il a dit, ce qu'il a écrit, le geste, tout ça, il n'y a rien à comprendre, puis c'est tout. On pourrait dire ça, mais après ça, par contre, on ne peut pas dire, quand il y a des gestes comme ça, c'est incompréhensible, il n'y a rien à comprendre. Si on ne fait pas l'effort de faire le diagnostic, c'est un ou l'autre aussi. Puis des fois, il faut tout à fait accepter aussi que c'est vrai qu'on comprend juste des choses partielles, puis que c'est juste des pistes. Mais en même temps, il y a...
[00:44:48] Speaker A: Mais de dire, par exemple, comme on a dit du capitaine Katagiri, le japonais, de dire, pour toute explication, nous lui donnons, ou il a reçu, un diagnostic de schizophrénie paranoïde. Ça... Oui. Ça...
[00:45:13] Speaker B: Ils ont encore...
[00:45:15] Speaker A: C'est comme de dire, l'avion, finalement, il est tombé parce que les moteurs se sont arrêtés. Ce n'est pas suffisant. On pense que c'est suffisant. On pense que c'est un mot qui veut dire quelque chose.
[00:45:31] Speaker B: Oui, c'est ça. Qui vient tout résumer ou tout encapsuler, qui vient tout lier en fait.
[00:45:35] Speaker A: Oui, c'est ça. Qui nous permet d'arrêter de penser le morcellement, par exemple.
[00:45:42] Speaker B: Tandis que la vie, quand même, la vie, c'est différent. Non, entre autres, parce que le garçon d'Andréa Sloobitz, il a 10 ans maintenant.
[00:45:53] Speaker A: Oh, c'est vrai, ça.
[00:45:56] Speaker B: La vie continue.
[00:45:58] Speaker A: Oh, c'est vrai.
[00:46:01] Speaker B: Puis on peut quand même s'imaginer la... On peut s'imaginer quand même la douleur de sa blonde, qui est enceinte de quelqu'un qui vient... Je sais pas ce qu'elle a pensé, elle était très discrète. C'est pas les États-Unis, ce cas-là. C'est pas des caméras partout, des entrevues partout. C'est le contraire.
[00:46:19] Speaker A: C'est le contraire. Les médecins refusent de parler. La dizaine de médecins qu'il a vus refusent.
[00:46:26] Speaker B: Oui, oui. Puis elle, son amoureuse, sa conjointe, Elle a fait zéro entrevue nulle part, à moins que...
[00:46:33] Speaker A: Mais comment tu l'as su? Comment la personne que t'as lu a su?
[00:46:38] Speaker B: Ben, si tu regardes les articles dans les jours suivants, très discrètement, des fois c'est dit, ça conjoint avec la qualité séparée. Mais c'est une petite touche, c'est pas...
[00:46:49] Speaker A: Et après on revient, ils sont très pudiques, on dirait, tout le monde en fait.
[00:46:52] Speaker B: Oui, c'est très, très pudique. Oui, il y a un respect. Fait qu'elle, j'ai même pas son nom en fait, je l'ai pas noté, mais il y a pas eu...
T'es pas passé au tout-des-chauds le lendemain matin, là, puis faire la tournée. Mais donc, t'imagines, j'allais dire...
la douleur d'avoir quand même la personne qu'elle aimait qui est décédée. Le geste horrible. Je veux dire là, c'est parce que c'est horrible. Il a amené dans sa mort 150 personnes.
[00:47:22] Speaker A: Mais là... Oui, c'est impensable même.
[00:47:25] Speaker B: Puis être enceinte de lui. Puis l'héritage pour le garçon. C'est pour ça qu'aussi des fois, on peut vouloir arrêter de penser, mais en même temps, je veux dire, reprendre ta métaphore de tantôt de l'âme, ça continue.
T'es un vrai garçon.
[00:48:04] Speaker A: On parle de psychose dans le cas d'Andreas Lubitz, mais ce n'est pas avéré, c'est une hypothèse diagnostique émise par un des médecins. Un des dizaines de médecins qu'il a rencontrés entre le mois de décembre 2014 et le jour du crash, le 24 mars 2015, donc en trois mois et demi à peu près. Le truc, mais on parlait aussi dans ce sillon-là de morcellement.
C'est quoi le morcellement psychotique, le morcellement physique? Louis Demier parlait d'une méthode qu'il a inventée, qu'il a développée en travaillant avec des psychotiques, qui était la méthode du packing. pour contenir des personnes psychotiques dans leur propre corps. Parce qu'il y a cette idée-là de morcellement du corps, mais il y a aussi la fuite de la pensée, la décomposition des idées. Dans le cas de Lubitsch, c'est pas par hasard non plus qu'il y a eu comme cette démultiplication-là de visites médicales.
sans coordination les unes avec les autres, c'est ça le truc. Morcelé, un suivi médical morcelé, il n'y avait rien pour le nier. On peut penser que ça faisait partie d'une frénésie décompensatoire, décompensation. Puis juste en passant, La psychose comme telle, elle n'est pas nécessairement décompensée. C'est comme quelque chose qu'on n'a pas dit, mais qu'on devrait dire parce qu'il y a eu aussi de la résistance à aller plus loin en lien avec la peur de stigmatiser les pilotes. Ça a été nommé, je pense, dans le cours de l'enquête. C'est-à-dire que c'est pas parce qu'une personne souffre de problèmes de santé mentale qu'elle peut pas être... qu'elle peut pas bien piloter un avion puis être responsable. C'est pas... Il y a pas nécessairement de lien de cause à effet. Et aussi, ce qu'on dit pas nécessairement, c'est qu'une personne psychotique, tu sais, je disais tantôt, on le sait tout de suite, quelqu'un qui est schizophrène, ça se voit tout de suite, quand il est décompensé, Mais la personne n'est pas nécessairement décompensée. Le président Schreiber est devenu président de la Cour d'appel de Dresde après avoir fait des études, après avoir été promu, c'est-à-dire après avoir fonctionné très bien dans son environnement professionnel pendant des années avant de sombrer dans le délai.
La décompensation psychotique est très morcelante, en fait. Ça peut être une manifestation, le fait d'aller voir plein de médecins, un après l'autre, après l'autre, après l'autre, sans coordination, sans liant, de la même chose, du même phénomène.
[00:51:17] Speaker B: Et quelqu'un peut avoir une fragilité et voir son état psychologique être fragilisé par... Quelqu'un peut avoir une fragilité et voir son état basculer par un événement extérieur aussi, ce qui est pour lui ou elle difficile de faire sens.
[00:51:34] Speaker A: Oui. Quelque chose qui est significatif du genre, par exemple, écoute, j'attends ton enfant, par exemple. On ne sait pas, c'est une hypothèse. Par contre, il y a quelque chose qui est arrivé à cause de cette espèce de dispersion dans ces consultations médicales, c'est qu'il s'est fait prescrire toutes sortes d'affaires en succession rapide. dans un très court laps de temps et qu'on a retrouvé, quand on a perquisitionné son appartement, des tonnes de pilules, des tonnes de bouteilles de pilules différentes. J'ai fait un petit inventaire des médicaments qu'on lui a prescrits et des dates.
Le 17 février 2014, on lui a prescrit du zopiclone. Le 24 février, donc une semaine plus tard, on lui a prescrit de la myrtazapine. En février et mars, on ne sait pas exactement à quelle date, on lui a prescrit du lorazepam. Le 16 mars, donc, le 16 mars, c'était une semaine avant l'incident et Au début de ses idéations suicidaires, parce qu'on situe ses idéations, il a exprimé son ne pas parler non plus, mais il a fait des recherches sur des façons de s'enlever la vie pendant une semaine avant le crash. On a retrouvé ça sur sa tablette.
Donc cette semaine-là, une semaine avant le crash, on lui prescrit de l'hécitaloprame, du dominal, du zolpiderme. Ces médecins-là qui lui prescrivent ça ne se parlent pas entre eux. Il n'y a pas de médecin, il n'y a pas de père.
[00:53:22] Speaker B: Il n'y a pas de grand autre coordonnateur.
[00:53:24] Speaker A: C'est ça. Il n'y a personne qui supervise l'affaire. Donc, il y a des médicaments, parmi ces médicaments-là, il y a des médicaments, le zopiclone qui est prescrit pour de l'insomnie à court terme. C'est comme Xanax, j'imagine, ou une autre molécule.
un somnifère ou un calmant. Tu as Myrtazapine, un antidépresseur. Ecitalopram, un autre antidépresseur, trouble anxieux. Ensuite, un autre médicament pour l'anxiété, agitation et insomnie.
Celui-là, le protipendyle, le dominal, ça s'appelle, a été prescrit. L'indication, ça a été prescrit le 16 mars. L'indication, c'est pour anxiété, agitation, insomnie. Probablement parce que c'est ce médecin-là, justement, qui soupçonnait une dépression psychotique. Ensuite, insomnie, un autre médicament pour l'insomnie.
Un autre médicament pour l'insomnie et l'anxiété. Là, il y a quelque chose que je m'étonne de ne pas avoir vu dans le rapport d'incidents. C'est-à-dire, on soupçonne que ce monsieur a un début de psychose ou des symptômes psychotiques, de dépression psychotique. On sait qu'il s'est fait prescrire une trollée de médicaments. Mais on ne parle pas des effets combinés de tous ces médicaments-là entre eux et des effets secondaires combinés de tous ces médicaments-là entre eux et des effets néfastes de certains de ces médicaments-là s'ils sont prescrits pour le mauvais problème.
Tu sais, il y a des antidépresseurs que tu ne devrais pas prescrire à des personnes que tu soupçonnes d'être psychotiques. Et alors, si tu prends cet antidépresseur-là et que tu prends l'antipsychotique, donc celui pour le dominal, pour l'agitation, ensemble, qu'est-ce que ça fait? Oui?
[00:55:39] Speaker B: C'est fou, hein? Non, ça n'a pas été très jasé. Puis tu sais, je t'écoute, puis c'est que j'ai encore la métaphore de...
des post-mortems après les accidents d'avion, où c'est sûr que l'équivalent pour l'accident d'avion, on en tiendrait compte? Si on a dit, ben là, on peut pas faire ça. On a employé tel lubrifiant pour nettoyer telle pièce, mais aussi tel truc pour nettoyer telle pièce, puis ensemble, ça bloque l'effet de ce que c'est supposé faire, puis la pièce est décollée. Là, on dirait tout de suite, Il y aurait des dizaines de procédures qui tomberaient. On ne peut plus faire ça, avoir des affaires comme ça qui viennent annuler l'autre ou causer des secondaires. Mais on n'a pas ce même focus-là, pareil, avec l'autopsie psychologique ou l'effet combiné des médicaments.
[00:56:30] Speaker A: Dans cette enquête-là, puis en général, parce qu'il y a quelque chose dans la pensée populaire. C'est-à-dire, c'est le domaine des psychiatres, ça, les problèmes de santé mentale, et en particulier la psychose. Si on prend la direction de se dire, bien, c'est un problème qui est fortement... influencé par la génétique et qui est, en fait, le résultat d'un désordre de fonctionnement des neurotransmetteurs, par exemple. Et donc, pour le traiter, il faut une médication appropriée. Et point, on ne va pas plus loin. C'est-à-dire que là, on a tout ce qu'il faut, tout ce qu'il faut. Il était peut-être psychotique et il était médicamenté, donc ça n'aurait pas dû se passer.
[00:57:22] Speaker B: Exact. Oui, c'est ça.
[00:57:25] Speaker A: Mais là, il était médicamenté tout croche.
[00:57:27] Speaker B: Oui, c'est ça.
[00:57:28] Speaker A: Par la faute de personne. Mais quand même, la combinaison des médicaments et les effets secondaires parmi lesquels, en tout cas, il y a certains médicaments qui accentuent la dépression et les idées noires.
[00:57:46] Speaker B: Deux ans plus tard, deux ans après l'accident ou le crash, donc en 2017, les victimes se réunissent, pas les victimes, mais les parents des victimes, les amis des victimes, pour commémorer ce qui est arrivé. Tu sais, c'est une des seules façons d'essayer de passer au travers, c'est des fois de créer des communautés de gens qui ressentent les mêmes choses que toi.
Et à ce moment-là, le père d'Andreas Lubitz fait une conférence de presse pour dire que, selon lui, c'est faux, ce qu'on a dit sur son fils. Il n'était pas en dépression, il n'était pas en crise psychotique. On s'est servi de ça pour ne pas enquêter comme il faut sur ce qui s'est passé. Et c'est presque la seule voix discordante qui dit ça. Mais il était accompagné de quelqu'un.
[00:58:40] Speaker A: Son avocat peut-être?
[00:58:42] Speaker B: Non, non, quelqu'un qui a une connaissance dans les avions, qui dit ouais, effectivement, on n'a pas fait, on n'est pas assez vite par rapport à tel détail, puis tout ça. Mais bon, je dis ça comme ça parce qu'on ne sait pas en fait le lien, on ne sait pas grand-chose du lien que Loubet savait avec son.
[00:59:02] Speaker A: Père ou comment... Ça doit être quelque chose de terrassant et dont tu ne t'en remets pas. À côté d'être une personne qui a perdu sa fille, son petit-fils, son beau-fils, à cause d'une décision de quelqu'un dans un crash aérien, comme le père de la cantatrice, Être le père de celui qui a posé le geste, ça doit être inimaginable.
Là, par exemple, de faire une conférence de presse pour dire, vous vous êtes trompé, moi, j'admets pas que mon fils, mon fils à moi, moi, mon fils que je connais, moi, à qui j'ai montré à piloter, peut-être, parce que là, s'il pilote depuis qu'il a 17 ans, c'est que les parents avaient à y voir, ils l'ont dû financer ou l'encourager.
[01:00:02] Speaker B: Non, mais c'était une famille qui était obsédée puis passionnée par la Delta Plane, puis tout ça.
[01:00:08] Speaker A: Ah oui?
[01:00:09] Speaker B: Oui. Puis on a passé vite tantôt, parce que ça ferait partie aussi des fois de l'autopsie psychologique de dire, OK, quel boignet a été utilisé, où, quand, comment, avec qui, ça symbolise quoi, ça représente quoi. C'est vrai qu'il est allé crasher l'avion à l'endroit où, quand il était adolescent, il faisait du deltaplan avec sa famille. Ça dit ça, ça en dit pas plus que ça, mais quand même, c'est pas un lieu nécessairement anodin. Il y a des choses comme ça. Puis je sais que c'est très...
C'est un curieux feeling parce que quand tu rentres dans certaines spéculations comme ça, il y a des gens qui s'en mettent mal à l'aise et qui vont dire « Ok, mais de toute façon, ça ne sert à rien. » Je veux dire, ça ne sert à quoi de dire que c'était un endroit qu'ils connaissaient, ça ne nous avance pas plus ou ça n'aide pas plus dans la prévention?
Mais en même temps, le principe, je me répète, c'est qu'à partir d'un certain moment, si tu prends le principe que ça vaut la peine de faire une vraie enquête pour trouver vraiment ce qui est arrivé quand l'avion a eu une défectuosité, bien, ça vaut-tu la peine de faire une vraie enquête pour trouver c'était quoi la défectuosité psychique? Parce que peut-être que... en le faisant avec un, puis avec un, puis avec l'autre. À un moment donné, tu te dis, ah bien, quand même, on dirait que quand les gens confrontent des grands événements comme la paternité ou la rencontre de la loi, s'il y a un procès qui s'en vient, ça, ça peut faire décompenser du monde fragile parce que symboliquement, c'est des repères importants. Ça fait que ça peut, à un moment donné, amener à prévenir différemment. Tu sais, c'est quand même le principe de dire, il n'y a rien à comprendre, il n'y a rien à penser.
Ça a des conséquences aussi?
[01:01:41] Speaker A: Tout à fait. Comme Huloff, par exemple. Il est allé voir des médecins au privé. Il est allé voir son médecin traitant, mais il avait un psychiatre traitant quand même, mais qui n'avait rien à voir avec l'aéronautique. Alors qu'il y a des médecins de l'aéronautique et des psychologues spécialistes en aéronautique, pour les pilotes, entre autres, mais pour contribuer aux enquêtes aussi.
mais que tu ne vas pas les voir quand tu es un pilote pour leur dire ce que tu vis parce qu'il y a comme une sorte de conflit d'intérêt dans la démarche si je te divulgue mes difficultés. je risque de perdre mon emploi, de ne plus pouvoir voler. Lui, il était confronté à ça, en fait. Il savait qu'il ne pouvait plus voler parce qu'il y avait le papier qui disait qu'il ne peut plus voler. Il n'est pas en état. Ça va tellement mal, il n'est pas en état. Donc, il savait qu'il ne pouvait pas voler. Il a volé quand même. Pas idiot, là, il ne va pas prendre le papier pour aller dire aux gens, regardez, patron, je ne peux plus voler. C'est son rêve et sa seule raison de vivre.
[01:02:53] Speaker B: C'est quand même curieux, comment tu peux donner un papier à quelqu'un en disant que tu n'as plus le droit de voler, mais en tout cas, il se fiait à sa bonne intention de le donner à ses supérieurs.
[01:03:02] Speaker A: Ben oui, quand tu vas voir un médecin, normalement, c'est un médecin à l'extérieur du réseau, tu vas voir un médecin, normalement, puis tu dis « Ah, je fais le pas, ta-ta-ta ». Bon, puis le médecin te met en arrêt de travail, c'est à toi qu'il donne la prescription d'arrêt de travail.
[01:03:17] Speaker B: Oui, t'as raison.
[01:03:19] Speaker A: Et toi, t'es responsable de la transmettre.
[01:03:21] Speaker B: Oui, t'as raison. C'est juste que là, ça a une tournée un peu différente parce qu'il est en charge du monde en pilotant l'avion, mais t'as raison. Il peut ne pas prendre de congés, c'est eux.
[01:03:32] Speaker A: Mais là, avoir une formation en psychologie de l'aéronautique, c'est pas nécessairement avoir une formation pour être à l'écoute des fragilités particulières des uns et des autres, et notamment d'une fragilité qui peut mener à une décompensation psychotique à des moments importants. C'est peut-être là aussi, c'est là aussi où l'enquête ne mène pas.
c'est à questionner la façon dont des pilotes seraient reçus, écoutés, entendus et soutenus par une compagnie aérienne qui les engage et qui a tout intérêt à ce qu'ils soient en bon état de santé générale pour piloter leurs avions. La question, c'est parce que ça existe, la psychologie de l'aéronautique.
Mais c'est une spécialité. J'imagine, je ne sais pas précisément qu'est-ce qu'ils font, mais j'imagine qu'entre autres, tu dois apprendre aux gens à se préparer à réagir à des situations de haut stress. Parce que c'est ça le souci, c'est la sécurité.
Tu n'es pas nécessairement quelqu'un qui a une idée approfondie de ce que ça peut être un signe ou des circonstances à potentiel de faire décompenser quelqu'un.
[01:04:56] Speaker B: Tu ne vas pas le suivre au.
[01:04:58] Speaker A: Quotidien de toute façon. Il ne viendra pas te le dire.
Ça fait que oui, dans le fond, on ne remet pas en question comment on fait les choses, comment est-ce qu'on sépare, par exemple, le psychologue de la compagnie. C'est comme dans les PAE, est-ce qu'un psychologue dans un PAE va aller dire au patron que l'employé lui a dit ceci, cela? Non. Mais là, c'est confus. dans son cas à lui, le psychologue ou le médecin aurait eu un devoir d'alerter le patron.
[01:05:40] Speaker B: Oui.
[01:05:41] Speaker A: Il aurait fallu que quelqu'un alerte le patron de toute façon. Mais du point de vue de celui qui consulte, si moi, j'ai pas intérêt à ce que ça se sache parce que je vais perdre ma passion, j'aurai plus jamais le droit de voler, puis en plus, je vais devenir aveugle, t'sais, par exemple.
[01:05:58] Speaker B: Ouais.
Mais en plus, parce que j'en ai rien pensé, c'est pas exclu non plus que...
C'est pas exclu, ça arrive pas nécessairement, mais souvent on le sait pas, c'est pour ça que ça reste un peu mystérieux, mais une personne qui est fragile, qui est confrontée à un événement de sa vie qui, pour d'autres, peut paraître banal, mais qui, pour lui ou elle, est quelque chose de difficilement symbolisable, qui vient l'ébranler et le morceler, disons, et qui pourrait mener même à une tentative, un passage à l'acte qui vient soit morceler ou au contraire terminer puis reconstituer. C'est possible parfois, ça arrive d'avoir à ce moment-là, pour la personne qui lui parle ou qui l'écoute, une parole qui vient colmater en partie la fragilité. Ça peut arriver.
Je ne sais pas ce que je suis en train de penser. Pourquoi s'intéresser à ça, en fait?
[01:07:03] Speaker A: Oui, c'est ça.
[01:07:04] Speaker B: Pourquoi s'intéresser à ça?
[01:07:06] Speaker A: On devrait s'y intéresser, en fait. Pourquoi s'intéresser à ça? On devrait s'y intéresser, non?
[01:07:12] Speaker B: C'est vrai que son pose comme ça, c'est vrai que c'est pas exclu, que deux humains connectent d'une façon où la personne en position d'autorité ou de savoir ou d'expert a une parole qui vient, ça en tout modifie, je parle pas un truc ésotérique. Miraculeux. Miraculeux, mais il y a une fragilité, on le sait pas, mais il va devenir père, c'était pas prévu, qu'est-ce que ça évoque? Puis de quelque chose qui vient assez resserré relier un peu pour que ça tienne un peu plus. Tu sais, c'est tout. Puis après ça, ça peut se délier, mais ça peut se relier. Puis tu sais, les mécanismes de la psychose, c'est en fait souvent des mécanismes courants, exacerbés en fait. On peut dire ça. C'est d'une certaine déliaison ou liaison ou une certaine fragilité qui déstabilise. Tout le monde peut vivre ça. Tu sais, c'est pas quelque chose qui est...
difficile à symboliser ou à comprendre. Dans ce cas-là, ça ne semble pas avoir été pris en compte tant que ça.
[01:08:14] Speaker A: Non, mais c'est ça. C'est ça. Puis ça n'aurait pas pu, parce qu'il n'y en a pas parlé.
Donc c'est le troisième et dernier épisode sur les accidents d'avion. Moi je pense que j'en ai assez entendu. Pas besoin d'en savoir plus. Je trouve que c'est comme une belle illustration Tu sais, de quelque chose qui est universel, la question de la pulsion de vie, la pulsion de mort, comment on est, on évolue, on meurt, on se décompose, puis la vie continue. Mais qu'on ait toute notre vie tiraillée par ce qui... Tu sais, c'est l'ordre et le chaos, la liaison, la déliaison, de comme partir en avion, voyager, voir le monde, ou bien donc tomber en avion et puis voilà, embrasser l'éternité.
[01:09:31] Speaker B: Puis en plus, tout ça vient s'inscrire dans un accident comme ça, dans finalement une toute petite place fermée. La cabine de pilotage, c'est tout petit. Physiquement, c'est un petit espace avec plein de manivelles, puis de boutons, puis de trucs qui ont beaucoup d'impact, dont il faut comprendre le fonctionnement. Puis en même temps, la névrose respective des gens qui conduisent.
[01:09:59] Speaker A: C'est pour ça que moi, je suis pas d'accord avec ceux qui disent qu'Andreas Lubitz est parmi les cinq pires meurtriers de masse de l'histoire. Dans le sens où, effectivement, il y a eu... Tout le monde est mort. Mais je ne pense pas que son intention ait été une intention homicidaire à aucun moment. Tu l'imagines enfermé dans son cockpit, tout seul, à piloter un avion, je pense que les gens sont morts comme effet secondaire d'une autre pulsion qui ne concernait que lui-même avec son pilotage et les montagnes.
[01:10:46] Speaker B: Oui, bien je ne sais pas, parce qu'il y a aussi la rumeur qu'il y aurait dit quelques années avant ou quelques mois avant ce passage à Lac-Lac-Lac, qu'il y allait un jour faire quelque chose pour passer à la postérité.
[01:11:00] Speaker A: – Ah oui?
[01:11:00] Speaker B: – Oui. Mais ça, comparativement à d'autres choses que j'ai dit aujourd'hui, dont j'avais plusieurs preuves, j'ai juste vu une place. Fait que c'est-tu vrai, tu sais, des fois dans l'après-coup, le monde y spécule des choses, puis ça, c'est pas vrai. Mais ça fait partie, en fait, des particularités du cas. On ne sait pas beaucoup de choses, on le répète, mais c'est vraiment le monde de la discrétion. Il n'y a aucune entrevue avec personne dans l'entourage, quasiment. Les gens sont à peine nommés, il y a beaucoup de pudeur. Attends, on a raison, ça a des avantages aussi. Ils n'en ont pas fait un cirque.
[01:11:31] Speaker A: Oui, c'est vrai.
[01:11:33] Speaker B: Puis aussi, des fois, quand tu penses aux victimes, c'est respectueux de ne pas voir la sœur, faire tous les talk show.
Mais bref, ça fait par contre qu'on en sait moins. Est-ce que, en contradiction avec ce que tu disais, est-ce qu'au contraire, il y avait l'idée quand même d'un passage à la postérité ou d'une célébrité ou quelque chose? Ou s'il était au contraire juste dans sa tête et il en est quasiment venu à oublier? Parce qu'il n'est pas allé se tuer en faisant du Delta Plan tout seul dans les Alpes non plus.
[01:12:07] Speaker A: C'est un fait.
[01:12:09] Speaker B: Mais en même temps, la cabine de pilotage, elle est fermée.
[01:12:16] Speaker A: Oui.
[01:12:17] Speaker B: Ça crée quand même un monde fermé.
[01:12:20] Speaker A: C'est un cocon.
[01:12:21] Speaker B: Oui.
[01:12:22] Speaker A: Ou il peut être... Peut-être que c'est une porte blindée.
[01:12:24] Speaker B: C'est ça.
[01:12:24] Speaker A: C'est tellement un cocon que le pilote peut même pas rentrer si tu veux pas qu'il rentre.
[01:12:28] Speaker B: Oui.
[01:12:29] Speaker A: Après être sorti.
[01:12:30] Speaker B: C'est ça. Fait qu'il y a aussi ça, est-ce que dans sa tête, comme le reflet de où il était physiquement, c'était juste lui dans ce petit monde-là. On ne sait pas. Mais on ne sait pas, en fait.