Leçons de la révolution roumaine

Leçons de la révolution roumaine
Après-Coup
Leçons de la révolution roumaine

Aug 08 2021 | 01:10:22

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Episode 33 August 08, 2021 01:10:22

Show Notes

Nous ne voyageons pas pour le plaisir de voyager, que je sache; nous sommes cons, mais pas à ce point.

Samuel Beckett, Mercier et Camier

La série d'événements ayant entraîné la chute du régime et l'exécution du couple Ceausescu s'est déroulée en quelques jours à peine.

30 ans plus tard, l'histoire définitive n'est pas écrite et les versions contradictoires continuent de rivaliser entre elles. Elles ouvrent la porte à une lecture de la révolution roumaine comme métaphore de nombreux phénomènes humains universels.

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[00:00:01] Speaker A: La série d'événements ayant entraîné la chute du régime et l'exécution du couple Ceausescu s'est déroulée en quelques jours à peine. Trente ans plus tard, l'histoire définitive n'est pas écrite et les versions contradictoires continuent de rivaliser entre elles. Elles ouvrent la porte à une lecture de la Révolution roumaine comme métaphore de nombreux phénomènes humains universels. Nous y revenons aujourd'hui. Vous écoutez. La dernière fois qu'on s'est parlé, le sujet, c'était Nicolae Ceausescu et sa femme Elena Ceausescu. C'est un thème dans lequel on s'est plongé, qu'on a essayé d'étudier le plus sérieusement qu'on pouvait avant de se rendre compte que la porte qui s'ouvrait donnait sur un univers infini de possibilités. On a parlé, quand on a parlé de Nicolas et Elena Ceausescu, mine de rien on a parlé de... leur narcissisme, disons. On a parlé de la population roumaine. [00:01:40] Speaker B: Du déni. [00:01:40] Speaker A: Du déni, de la population roumaine qui s'est trouvée en complicité avec la folie d'un couple. On a parlé de tout, la Paratchik, la communauté communiste qui soutenait et encourageait le maintien d'une illusion d'autorité ou de compétence communiste dans la Roumanie de 1965 à 1989. On a parlé de l'exécution sommaire, du procès sommaire et de l'exécution du couple en question. [00:02:22] Speaker B: Dont on a su... Je ne sais pas si on l'a dit, mais parce qu'on a lu plein de trucs avant, on n'en a pas parlé, on a lu des choses après le podcast dont on va parler, par rapport au procès, que c'était déterminé d'avance, non seulement la sentence, mais la durée du procès. [00:02:37] Speaker A: Oui. Non, on n'en a pas parlé. [00:02:39] Speaker B: C'est quand même pas rien. [00:02:40] Speaker A: Oui. [00:02:40] Speaker B: Si c'était déterminé que ça durait plus ou moins une heure, il y a quelques raisons, il était coupable. [00:02:45] Speaker A: Donc ça a duré 55 minutes. Au terme de ça, il était coupable. Ça a pas pris, je sais pas, au moins 10-15 minutes plus tard, ils étaient exécutés. Et pour la postérité, l'image qui est restée d'eux, c'est l'image de deux corps morts côte à côte à l'école où ils ont été passés en soi-disant procès, dans un contexte où on improvisait plus ou moins. Il y avait comme beaucoup de forces en puissance, il y avait d'énormes pressions. Ils ont, comme disait quelqu'un, ils ont eu le pire de deux mondes, c'est-à-dire un faux procès et une exécution bâclée. [00:03:25] Speaker B: Et une vraie exécution. [00:03:28] Speaker A: Ils sont vraiment morts, mais tout croche. [00:03:31] Speaker B: Oui, c'est ça. C'est vrai que c'est le pire des deux mondes. [00:03:35] Speaker A: Ils auraient pu mourir comme il faut. [00:03:37] Speaker B: Ou pas mourir du tout. [00:03:42] Speaker A: Oui, c'est vrai qu'il aurait pu ne pas mourir du tout. On aurait peut-être eu quelque chose d'encore plus intéressant, quelque chose de plus valable pour la suite de la Roumanie, parce que, en fait, ce qu'on sait depuis, c'est que le successeur de Ceausescu, qui était là au fil des premières heures à la télévision roumaine, qui était comme prise à partie par tout un paquet de groupes d'intérêt où chacun essayait de prendre le dessus, est devenu, lui, l'homme fort de la Roumanie. [00:04:20] Speaker B: Juste avant, il y a quelqu'un qui a essayé, puis ça n'a pas fonctionné. Il y a quelqu'un qui a essayé, puis je ne me rappelle plus son nom, puis il disait que ça a été le gouvernement le plus court. Ça a duré comme 20 minutes, puis ça n'a pas collé. [00:04:30] Speaker A: Oui, le gouvernement de 20 minutes. [00:04:32] Speaker B: Puis il a été éjecté. Mais parce que c'était tellement comme une fenêtre dans l'histoire. C'est tellement une fenêtre qui s'ouvre. qui va se refermer puis qui ne dure pas longtemps, que si tu n'arrives pas avec le bon positionnement, ça ne tient pas. Et d'où l'idée ou la décision d'exécuter Charles Gescoe, parce que s'il continue à vivre, puis il proteste, puis il reprend du galon, puis la sécurité le suit, bien là, il y a la crainte que, finalement, la fenêtre va se refermer puis ça va continuer comme ça. [00:05:07] Speaker A: Mais en fait, la fenêtre s'est refermée. Ça a continué comme c'était, mais juste autrement, sous diverses apparences. Fait que là, on veut revenir un petit peu là-dessus parce que... [00:05:19] Speaker B: En fait, il y a tellement de choses qu'on voulait juste poursuivre. [00:05:23] Speaker A: Oui, c'est ça. C'est comme tellement riche d'enseignements, toute cette révolution-là de quatre jours ou cinq jours. [00:05:31] Speaker B: Que... Ça vaut la peine d'élaborer ou de répéter. [00:05:35] Speaker A: Exactement. Là, tu m'as envoyé un texte qui est une analyse de la révolution roumaine. avec une perspective qui est Erving Goffmanienne. Donc Erving Goffman a théorisé quelque chose d'une lecture de la scène sociopolitique à partir des instruments ou de la compréhension du théâtre, dans le fond. La comédie humaine, si on peut le dire comme ça. Et il a fait, en fait, l'article que je vais mettre en référence, se sert des outils d'interprétation d'Irving Goffman, que moi je connais pour son ouvrage sur les asiles, entre autres, mais qui a offert une possibilité de lecture de la scène sociopolitique, qui est appuyée sur une analyse des rôles des scènes, du positionnement des personnages, de l'intentionnalité théâtrale, disons, du message que tu veux transmettre à un public X et donc de la représentation que tu te fais du public auquel tu t'adresses. Donc une analyse de la Révolution roumaine qui s'appuie sur cette logique-là, qui était vraiment intéressante. Puis on voulait partir de là pour parler d'un paquet de choses, parce que ce qui s'est passé là, c'est hallucinant. C'est une micro-fenêtre qui s'ouvre pendant une très, très courte période sur, en fait, c'est quoi l'exercice du pouvoir. C'est quoi la réalité de ce que c'est une révolution? [00:07:34] Speaker B: Sur quoi ça tient, ça? C'est quoi les fondements de ça? Le semblant dans l'affaire? [00:07:39] Speaker A: Comment on construit un récit national? Comment on essaie de fabriquer un discours qui est cohésif pour une société autour du... C'est un discours autour duquel une société peut se rassembler. Puis aussi... Moi, c'est ce qui m'interpellait particulièrement, comment on manipule les foules et qu'est-ce que c'est que cette énergie-là qui peut s'emparer de foules, c'est-à-dire d'un rassemblement de dizaines, voire de centaines de milliers de personnes qui se mettent à agir en commun comme un seul organisme, mais qui peut aussi se déstructurer s'il y a une perturbation en son sein. [00:08:33] Speaker B: Oui, il y a tout ça. En plus, pour rajouter un élément, il y a tout ce qu'on raconte indépendamment de ce qui s'est passé, mais dans l'après-coup, pour refermer l'histoire ou en faire quelque chose de plus lisse, qui va dans le sens du propos qu'on veut tenir. Puis on le voit en étudiant, des fois, c'est quand même fort comme effet. Tu vois des gens qui se présentent et qui sont, selon toi, de vraisemblance très crédibles pour être... des professeurs d'université, spécialistes de la question, qui racontent des choses qui se sont passées, qui ne se sont pas passées, mais juste parce que ça fait une histoire plus punchée, plus simple, dans le sens de ce qu'on veut dire. [00:09:14] Speaker A: Plus facile à analyser. [00:09:16] Speaker B: D'ont entre autres. Ça a l'air d'un détail, mais c'est quand même pas rien. Ce que je commence à croire, c'est ouvert à des changements selon ce qu'on découvre, mais c'est que le 15 décembre, à Timisoara, il y a eu une première uprising des gens qui voulaient défendre le prêtre, comme on a parlé. [00:09:35] Speaker A: C'est comme on en parlait la dernière fois, donc ça c'est le précurseur de la révolution roumaine, qui a eu lieu du 22 au 25 à peu près, décembre 1989, et qui s'est poursuivi jusqu'à la prise du pouvoir par Ilion Ilescu. [00:09:54] Speaker B: Mais le détail qui n'en est pas un, c'est que ça commence le 15 décembre, il y a des rassemblements, il y a des gens qui se joignent, tout ce qu'on a décrit la dernière fois autour du fait qu'il y a des soldats dans des tanks qui joignent le monde, puis que ces soldats-là, ce n'est pas des soldats, C'est le beau-frère. [00:10:17] Speaker A: D'Un, c'est du ton, tu sais. [00:10:20] Speaker B: C'est quand même fort. [00:10:21] Speaker A: C'est pas juste le beau-frère, c'est peut-être juste le frère aussi. [00:10:24] Speaker B: Oui, mais moi, j'aime ça l'image du beau-frère. Pourquoi tu défais mon... [00:10:28] Speaker A: Le frère, le papa. Tu défais ma névrose, mais bon, OK. [00:10:34] Speaker B: Puis là, après, évidemment, il y a Charles Cescou qui quitte pour l'Iran. Il revient le 21. C'est le 21 que son discours, qu'il a fait histoire. [00:10:44] Speaker A: Il quitte pour l'Iran. Juste une petite parenthèse. Il quitte pour l'Iran. On sait qu'il est allé visiter la Reine d'Angleterre et machin et Mao et blablabla. Et il quitte pour l'Iran de l'Ayatollah Khomeini. [00:11:00] Speaker B: Oui, oui, c'est pas anodin. Et il revient le 21, il fait son discours au Palace Square et c'est là que ce discours-là fait l'histoire où on le voit un peu beaucoup perdre la face quand les gens commencent à protester, ce qui est inhabituel. Mais là c'était la question de est-ce qu'il y a quelque chose qui s'écroule dans tout l'échafaudage symbolique qui avait été créé, puis il doit quitter en hélicoptère tout de suite ou non? Et là, moi, ce que j'ai découvert, ou en tout cas, en continuant à fouiller l'histoire, c'est que ça se passe pas comme ça. C'est pas le soir même ou tout de suite après qu'il doit quitter en vitesse, en hélicoptère. Il termine, contrario de ce que plein de gens disent, qui apparaissent très crédibles, qu'il doit quitter en hélicoptère à toute vitesse parce qu'il reste, il reprend un peu sur lui, il finit son speech. Il y a du brouhaha dans la foule, mais ça reste en contrôle. Et c'est le lendemain matin que là, il envoie lui et ses représentants un communiqué qui a un effet contraire à ce qu'il pensait vraisemblablement, un communiqué qui dit que le général Miela, je crois, quelque chose du genre. [00:12:12] Speaker A: Oui. [00:12:13] Speaker B: Le général qui est en charge de la sécurité. [00:12:16] Speaker A: De l'armée. [00:12:17] Speaker B: De l'armée, est décédé. Et là, les gens prennent ça comme quoi il était de leur côté et il a été exécuté. [00:12:29] Speaker A: C'est ça, il est décédé par suicide. C'est pas ça qu'on dit en partant? [00:12:35] Speaker B: Moi, je pense que le peuple pense que Ceausescu l'a exécuté parce qu'il était sur le bord de prendre le côté du monde. [00:12:43] Speaker A: Sauf que le communiqué annonce que c'est un suicide. [00:12:48] Speaker B: Oui, exact. C'est ça. Le communiqué annonce que c'est un suicide. [00:12:50] Speaker A: Et donc, le peuple ne croit pas Charles Chesney. [00:12:52] Speaker B: C'est ça. [00:12:53] Speaker A: Oui. C'est ça. [00:12:54] Speaker B: C'est ça. Exactement. Tout à fait. Donc, le gens ne croit pas que c'est un suicide. Ils croient qu'il a été exécuté parce qu'il était de leur côté et qu'il allait le révéler et qu'il allait vraiment faire basculer l'affaire. Et ça, ça donne un autre souffre. [00:13:06] Speaker A: À l'armée. [00:13:07] Speaker B: À l'armée. Et là, il doit quitter en hélicoptère. Et c'est là que ça débarque. à cause de cette affaire. [00:13:12] Speaker A: C'est une grosse gaffe. [00:13:13] Speaker B: Mais là, est-ce qu'il a été exécuté, c'est comme on lui a reproché dans son procès, et que lui nie, ou est-ce qu'il s'est suicidé, ou est-ce qu'il y a eu une troisième option, et ça semble être la troisième option qui est la plus vraisemblable. [00:13:26] Speaker A: C'est quoi la troisième option? [00:13:28] Speaker B: Il n'a pas été exécuté, il ne s'est pas suicidé. il y aurait été mal à l'aise, j'ai trouvé un article très obscur, je ne pense pas que je peux le retrouver, je l'ai trouvé et je l'ai effacé juste pour pouvoir te le raconter. [00:13:42] Speaker A: Il y a du vol de propriété intellectuelle. [00:13:44] Speaker B: En analysant tout ce qui s'est passé, il semblerait que ce général-là se sentait comme échec aimant, se sentait coincé. Donc, était dans un côté avec le monde, était d'un côté loyal à Charles Descaux. Puis comme d'habitude, c'est pas trop... On peut vraiment imaginer quelqu'un qui sait pas trop quel bord prendre, parce que c'est pas trop quel bord ça va prendre. C'est vraiment à la jonction de... Ça pourrait lever la Révolution, mais ça pourrait pas lever du tout. Et si ça lève pas, t'es mort. [00:14:18] Speaker A: C'est ça qui est cool de ces quatre jours-là. C'est vraiment charniant. [00:14:23] Speaker B: Alors, sais-tu ce qu'il a fait? [00:14:25] Speaker A: Qu'est-ce qu'il a fait? [00:14:26] Speaker B: On raconte, selon l'autopsie, qui serait vraisemblablement, je vais le dire à la française parce que je me rappelle avoir vu un film qui s'appelait Les Ripoux, où le ripoux, le policier, disait à son autre accueillé de policier, tire-moi dans le gras du bide. Comme ça, je vais être incapacité, mais je mourrai pas, puis je vais juste comme être entre parenthèses pendant un temps, pendant que l'hippo qu'on a fait se tasse. Et donc, c'est supposément que c'est ça qu'il aurait fait. Il aurait voulu... [00:15:01] Speaker A: Il a essayé de pas mourir, mais d'avoir l'air... [00:15:04] Speaker B: Il a essayé de se mettre hors-jeu, en se tirant. [00:15:06] Speaker A: C'est quoi le résultat de l'autopsie? Il est mort de quoi, en fait? [00:15:10] Speaker B: Ben, il s'est tiré, mais... [00:15:11] Speaker A: Il a raté. Il a visé sa veine. [00:15:14] Speaker B: Lui, il voulait se tirer comme dans le gras du ventre, discuter là-dedans. Mais finalement, je vais éviter les détails, mais il en est mort. Mais c'est pas si impossible qu'il ait voulu se mettre hors circuit, tu sais, c'est une réponse. qui a une certaine logique de dire, je ne joins pas le monde, je ne continue pas avec le pouvoir en place, je ne veux pas être là, je me mets juste... [00:15:40] Speaker A: Je ne veux pas être là, mais je ne veux pas être mort. [00:15:41] Speaker B: C'est ça que tu veux dire. Écoute, c'est l'obsessionnel, c'est beau. C'est la vie de l'obsessionnel. Je ne veux pas être là, mais je ne veux pas être mort. Je me mets hors circuit pendant un bout de temps. Je ne dirais pas que c'est beau quelques semaines après. [00:15:57] Speaker A: C'est tragique. [00:15:58] Speaker B: J'ai l'air de rire, mais ce n'est pas drôle. Par rapport à ce que ça fait, ce que ça a comme position subjective et obsessionnelle, c'est quand même une belle illustration. C'est tiré dans le gras du bide. [00:16:10] Speaker A: Ce que tu dis, c'est que le général de l'armée a essayé de fake mourir. mais qu'accidentellement, il est mort pour vrai, sans faire exprès. Son objectif était de se blesser suffisamment... [00:16:30] Speaker B: Pour être encerclé. [00:16:31] Speaker A: Pour être hospitalisé... Pendant quelques jours. [00:16:34] Speaker B: Pendant que ça se tasse. [00:16:35] Speaker A: Le temps que ça se tasse, puis qu'il reprenne ses esprits. [00:16:37] Speaker B: D'une façon ou d'une autre. Puis quand tu reviens de ton malaise, tu vois quelle barre ça a pris. [00:16:41] Speaker A: C'est juste qu'il n'est jamais revenu de son malaise parce qu'il est défunt. Et que quand les gens ont reçu, en particulier l'armée, quand l'armée a reçu le communiqué de presse de Ceausescu annonçant le décès du chef de l'armée roumaine, donc l'armée a interprété que c'était un suicide, ce que ce n'était pas. Quand tu es dans un fake pays, c'est comme, c'est quoi que tu peux croire? [00:17:13] Speaker B: Tout est possible. Tout à fait. [00:17:16] Speaker A: Ce que l'armée a compris, entre les lignes, c'est que le général en question s'était suicidé. pour défendre la population et donc c'est de là que, par exemple, l'aéroport de Bucarest a été fermé et interdit d'accès. Achar Chesku et sa femme, quand ils ont essayé d'y atterrir, avec l'hélicoptère qui était leur sauveconduit vers... Tu sais, ils auraient pu aller n'importe où. Ils auraient pu se rendre en Chine, ils auraient pu... Ils sont pas partis. Ils ont quitté le palais présidentiel en hélicoptère. et ils se sont fait domper au bord de la route parce que le pilote de l'hélicoptère n'a pas pu atterrir à l'aéroport. Donc ça, c'était le 23 décembre 1989. [00:18:15] Speaker B: Le 22 ou le 23, je ne sais plus. [00:18:17] Speaker A: Le jour, en tout cas, pas tellement longtemps après qu'on ait annoncé, c'est que c'est là que l'armée est devenue sédicieuse. [00:18:24] Speaker B: Oui. [00:18:25] Speaker A: C'est quand on a entendu de canots officiels que le général était mort, qu'on a tout de suite interprété qu'il s'était suicidé et qu'on a tiré comme conclusion qu'il y avait là un message adressé à toute l'armée. C'est-à-dire un message de désaveu du pouvoir en place. [00:18:47] Speaker B: Oui. Mais ça se peut aussi, est-ce que ça se peut aussi qu'il y ait des gens qui ont pensé qu'il avait été exécuté et que là, c'était une rébellion contre ça aussi? C'est-à-dire, là, il allait se joindre au monde. [00:19:00] Speaker A: C'est que d'un ou l'autre, Charles Chescault était échec et match. [00:19:03] Speaker B: C'est ça. Oui! [00:19:04] Speaker A: Il aurait pu rien dire. [00:19:05] Speaker B: C'est quand même une ironie incroyable. [00:19:06] Speaker A: Il aurait sauvé la vie. [00:19:08] Speaker B: C'est quand même une ironie incroyable, c'est vrai, qu'une personne qui se dit à un moment crucial, moi, je choisis quand même une façon assez drastique de me mettre hors-jeu pour ne pas prendre position parce que je ne suis pas capable. [00:19:18] Speaker A: Puis qu'il devient le cœur de l'affaire. [00:19:20] Speaker B: Oui! Non seulement ça a fait un impact, mais en plus, il est décédé. [00:19:24] Speaker A: Oui, c'est ça. Il a pas pu raconter son histoire, pauvre loup. Mais on rit, mais c'est pas drôle, c'est des vraies personnes. Je comprends. C'est juste pour le théâtre, t'sais, si on comprend. [00:19:38] Speaker B: Mais en même temps, c'est pas... On rit, mais, t'sais, pour en revenir à ce que tu disais tantôt, le procès, quand on le compare à une pièce de théâtre... Oui. Je veux dire, la comparaison est pas aussi far-fetched, là. C'est assez absurde. Puis juste pour en donner un exemple, dont je pense pas on a parlé la semaine passée, mais t'sais, à la toute... En fait, tout le long, Ceausescu et sa femme prennent la position lors du procès de ne pas reconnaître les gens et l'autorité qu'ils se donnent à l'intérieur du procès. Fait qu'ils ne reconnaissent pas le juge, ils ne reconnaissent pas les charges qui sont émises contre eux, ils ne reconnaissent pas les avocats, ni de la couronne, ni de la défense. Ils ne reconnaissent pas ce truc-là qui est improvisé en fait, fait à bâcler. Et donc, c'est une position d'être hors-jeu de cette construction-là, puis de dire, ben non, moi, je suis prêt à me défendre là où il se doit, à l'Assemblée, je sais pas quoi, je sais pas quoi, je suis encore le président, puis il y a des institutions qui existent, puis c'est là que je vais être jugé, pas dans cette salle-là, toute. [00:20:42] Speaker A: Militaire, petites places, classes d'école, tout ça, tu sais. [00:20:45] Speaker B: Mais sauf que l'ironie, puis l'absurdité de l'affaire, c'est qu'à la fin, l'avocat de la défense, donc leur propre avocat, dit, dans son plaidoyer final, comme mes clients, que je m'éprise en pensant, c'est quand même quelque chose là, comme ils ne reconnaissent pas mon autorité, ils les chargent contre eux. Donc comme ils ne reconnaissent pas ça, je ne peux nécessairement pas aller en appel, puisqu'ils ne reconnaissent pas ce qui se passe ici. Et donc, comme je ne peux pas aller en appel, ben j'y vais pas. Donc tirez vos conclusions et condamnez-les. Parce que sinon, il aurait eu droit à un appel. [00:21:30] Speaker A: Mais c'est parce qu'ils ne reconnaissaient même pas l'avocat. [00:21:33] Speaker B: Ben non, ben c'est ça. [00:21:34] Speaker A: On ne te reconnaît pas. [00:21:35] Speaker B: Puis l'avocat dit, bon, vous ne reconnaissez rien, donc je ne peux pas dire... Donc il leur dit quasiment, si vous acceptez que vous êtes coupable, puis que vous le dites, je vais pouvoir dire, donc on reconnaît que vous nous dites qu'on est coupable, puis on va en appel, puis on proteste. Mais là, comme vous ne reconnaissez pas notre autorité, ben vous êtes en your own, puis c'est terminé. C'est quand même, tu sais, c'est vrai que c'est de quoi l'absurde. [00:21:56] Speaker A: Oui. Juste pour la petite histoire, si je peux me permettre, il y a un documentaire où, t'sais, les gens, les Français, les journalistes français qui sont des journalistes de guerre, t'sais, qui couvrent la couverture. Oui, c'est ça. [00:22:17] Speaker B: Avec une couverture. [00:22:20] Speaker A: C'Est comme super excité, puis il se retrouve dans un hôpital parce que pendant, tu sais, entre le moment du discours fatidique et très mal avisé, dont on peut se demander, tu sais, Qui a conseillé Ceausescu? Qui lui a recommandé de tenir une assemblée aussi populeuse quelques jours, même pas une semaine, après des événements mortels en région, autour de la paroisse de... Comment? Laszlo? Laszlo Tokes? Du pasteur hongrois qui... dont on a parlé au dernier... Il faut que je vais lier le dernier podcast, là, pour que ce soit comme cohérent. Donc... entre le moment où il tient ce discours-là, qui est très mal avisé, qui s'avère être le début de sa chute, qui est une chute vertigineuse qui se déroule en cinq jours. Au total, c'est entre ce discours-là et sa mort, il y a quatre jours. Donc, il tient ce discours-là... [00:23:38] Speaker B: Après des années, des décennies de pouvoir. [00:23:41] Speaker A: C'est ça, absolu, de terreur dans toute la Roumanie. [00:23:46] Speaker B: Tout le château de cartes s'écroule en quelques jours. [00:23:48] Speaker A: D'un coup sec. Alors, il tient ce discours-là. Il y a de la grogne dans la foule. On arrive ou on n'arrive pas, selon les perspectives et la façon dont on raconte l'histoire, à contenir la foule. Mais peu importe, le lendemain, Elena Ceausescu et son mari Nicolai s'enfuient en hélicoptère sur le toit du palais présidentiel. quelques secondes ou minutes à peine avant qu'on voit les manifestants arriver sur le toit. C'est-à-dire qu'ils sont à peine rentrés dans l'hélicoptère qui n'a même pas encore décollé, que des manifestants sont déjà là. Ils ont envahi le palais présidentiel. Tu as un des documentaires où le journaliste s'en va dans les hôpitaux. de Bucarest, est aujourd'hui madame de 103 ans. Excuse-moi, parce que je trouve ça tellement savoureux. La vieille madame de 103 ans est rentrée à l'hôpital, kicking and screaming, OK? Elle a graffiné du monde. Elle est frue, elle est enragée, la madame, t'sais. C'est une madame qu'ils ont retrouvée errante dans le palais présidentiel. Ouais. Puis il la filme dans son lit d'hôpital. Elle a 103 ans, la madame. Il la filme dans son lit d'hôpital, puis elle est vraiment frue. Elle aime pas ça être là. Elle les déteste tous. Elle les honit. Et ce que t'apprends, c'est que c'est la mère d'Héléna... C'est pas drôle. C'est pas drôle, mais c'est drôle. [00:25:40] Speaker B: C'est incroyable, cette histoire-là. [00:25:42] Speaker A: Donc Elena et son mari se sont envolés en hélicoptère, lui avec sa montre bionique qui allait l'aider à se faire retracer par des services secrets qu'ils ont finalement lâchés. qui s'enfuient, qui sont incapables d'atterrir à l'aéroport de Bucarest, qui est la ville sur laquelle ils avaient le contrôle, comme ils avaient le contrôle de tout le pays, genre 12 heures avant. On refuse parce que le général est mort et qu'il est réputé soit exécuté par un pouvoir torsionnaire, soit suicidé par soutien du peuple. Ce qui n'est ni l'un ni l'autre. Juste essayer d'éviter la situation. Tu sais comme tu fais quand tu veux... Il faut que tu donnes une présentation pour ton cours de je sais pas quoi, puis ça te rend super stressée, puis tu te sens pas prêt, puis t'espères juste que tu vas te faire frapper en chemin. Pas pour mourir, mais juste pour être à l'hôpital. [00:26:51] Speaker B: Oui, c'est ça. Je ne sais pas d'où tu prends ça, mais oui. [00:26:55] Speaker A: Juste pour pouvoir dire, je ne suis pas venue à mon expo. [00:27:00] Speaker B: Oui, c'est ça. Non, mais tu veux que le destin choisisse à ta place. [00:27:03] Speaker A: Mais ce n'est pas de ma faute. [00:27:04] Speaker B: C'est ça, oui, tout à fait. [00:27:08] Speaker A: C'est ce qu'il a essayé de faire en se tirant dans le ventre, mais qu'il a comme raté parce qu'il... Donc... [00:27:14] Speaker B: Ça reste périlleux comme solution, là. Et je dis l'expression parce que... [00:27:20] Speaker A: Clairement, il en est mort. [00:27:20] Speaker B: Oui, voilà. Mais te rappelles-tu... C'est pas important, mais l'extrait des Ripoux où... Comment il s'appelle l'acteur qui... [00:27:28] Speaker A: C'est Philippe Noiret. Puis l'autre, attends, que j'adore, dont tellement... [00:27:34] Speaker B: Qui a fait le dîner de cons et tout. [00:27:36] Speaker A: Oui, Philippe Noiret, puis... Ah, voyons. [00:27:43] Speaker B: Je ne peux pas m'empêcher d'aller voir Par la magie d'Internet. [00:27:50] Speaker A: Parce qu'on l'aime tellement, lui, on l'aime tellement, parce qu'il aurait pu faire tous les rôles de bel homme dans tous les films qui requièrent un bel homme. Puis finalement, tout ce qu'il a fait dans sa vie, c'est de l'humour, là. Puis de l'autodérision. Thierry Lhermitte. [00:28:05] Speaker B: Thierry Lhermitte. Exact. Mais... Oui, bien... Puis donc, c'est pour ça, en fait, je pense, l'élan qu'on a eu de reparler de tout ça, c'est parce que... Il y a tellement de choses qui se passent dans ces quelques journées-là qu'on peut utiliser comme microcosme pour parler de plein d'autres choses. Puis en même temps, d'une autre façon, c'est un événement qui a des racines dans quelque chose de plus large, qui a sa place dans l'histoire des idées, dans le communisme, etc. Mais donc une autre chose, je sais pas, peut-être je t'interromps, je sais pas de quoi, qu'est-ce que tu voulais ajouter, mais ça me fait penser à l'idée de... c'est non seulement de la position du général qui est la position un peu de l'obsessionnel, mais de ce qui s'est passé dans le procès, qu'ils voulaient un procès qui serait performatif, en fait. Tu sais, donc c'était pas juste des mots, on voulait pas juste dire qu'il y ait du blabla, puis des mots, on voulait que ça fasse un image, que ça soit performatif et que ça finisse par une exécution. [00:29:16] Speaker A: C'est que les mots soient des actes. [00:29:18] Speaker B: Oui, c'est ça. de qu'est-ce qui se passe dans ce procès fou là. C'est fou parce que donc la durée et la conclusion est décidée d'avance. Mais ce que je voulais souligner c'est que souvent quand on a étudié par le passé des meurtres ou des tueries de masse, des mass murder puis tout ça, il y a l'idée d'avoir quelque chose de l'ordre du réel qui vient faire irruption dans la réalité, puis toute la construction fantasmatique qui la soutient. Puis tu peux le comprendre facilement, tu fais tes affaires, tu vas au centre d'achat, tu magasines, d'un coup, quelqu'un qui arrive avec un fusil, il tire, tout le monde se cache d'un coup. Tout devient brisé. C'est-à-dire qu'il y a de quoi qui vient percer la construction dans laquelle tu vis. Et d'un coup, ça n'a plus d'importance, les rabais que tu cherchais. Ou d'autres choses de cet ordre. Mais là, ce qui se passe, c'est pas vraiment ça. On pourrait dire qu'il y a de quoi, qu'il vient faire l'éruption quand Charles Chescault fait son discours, mais pas tant quand même. Il est mal à l'aise par rapport à ce qui se passe, mais plus fort, je trouve, c'est vraiment... deux ordres symboliques lors du procès qui s'affrontent. C'est-à-dire qu'il y a des gens qui disent, bien, voici, nous, on s'inscrit dans une réalité où on a une autorité morale, où ça s'inscrit dans quelque chose qui est reconnu. Et l'autre personne qui dit, bien, non, je ne reconnais pas qui vous êtes. Vous n'êtes rien. C'est moi qui est président de la Roumanie. Vous venez d'improviser un truc qui ne tient pas debout. Vous êtes 15 personnes. qui viennent d'arriver pis je reconnais pas du tout ça pis ça se tient qu'ils le reconnaissent pas. Fait que pour l'illustrer pareil, l'aspect performatif de l'affaire. Donc, ce qu'on veut, la personne, le camp qui va l'emporter, puis on sait pas ça va être lequel nécessairement, parce que si des forces de l'ordre arrivent pendant le procès, ça peut facilement virer de côté. Puis toutes les 15 personnes se font arrêter, se font se traiter de clowns, puis c'est terminé. Tu sais, tout s'effronde. Pour l'illustrer, j'imaginais, parce que ce n'est pas si simple, on n'y pense pas toujours, moi je l'oublie cet aspect-là performatif du discours, parce qu'on peut parler dans la vie, puis dire de ce qu'on pense, puis donner notre opinion, puis blablabla, personne n'est pas d'accord, puis il rajoute du blablabla, puis il y a plein de blablabla, mais si tu te promènes dans la rue, sur Côte-des-Neiges, puis à un moment donné, il y a quelqu'un qui t'amène à entrer dans une espèce de place, que tu te rends compte une fois là qu'il y a une chapelle, puis t'as un monsieur qui se présente, puis qui dit, par l'autorité reconnue en moi par des forces supérieures et blablabla, il prend un gars, il met à côté de toi, puis il dit, je vous déclare mari et femme. Ça marche pas, tu sais. Je veux dire, toi tu vas dire, non mais je ne reconnais pas ton autorité, je ne reconnais pas cette chapelle comme une représentation, je ne connais rien de tout ça, tu sais. Mais imagine-toi pareil que ça t'arrive, parce que c'est ce qui arrive à Ceausescu dans un sens, puis qu'au même moment, il y a des gens proches de toi que tu connais, qui te lancent des confettis, puis qui reconnaissent ce qui s'est passé. Mais ça vient tout d'être bâclé. Puis moi, je reconnais juste... je sais pas quoi, tu sais, l'Église catholique ou la ville de Montréal ou tel jeu, tu sais, d'autres choses. Puis là, si quelqu'un vient t'appuyer, bien là, tu peux dire, OK, je vais avoir le pouvoir avec moi, puis je vais avoir à faire un contrepoids. Mais tu sais, bref, t'as l'impression qu'il y a deux ordres symboliques qui s'affrontent, qui essayent de trouver des assises à leur construction, puis pendant un bout de temps, tu sais pas qui va avoir la balance du pouvoir. C'est quand même... C'est quand même quelque chose comme situation. Puis l'enjeu n'est pas banal, parce que quand tu charges de secours, tu perds, puis tu fais exécuter. Puis comme je dis, je pense que si les membres de la police arrivent, bien, ça peut facilement être tout effacé, cette histoire-là. Puis en très peu de temps être. [00:34:06] Speaker A: Repris... Et c'est d'autres personnes qui se font exécuter. [00:34:09] Speaker B: Oui, puis être très peu de temps repris par... ces médias qui contrôlent, qui diraient, bien voilà, ce qui s'est passé, c'est qu'il y a des forces étrangères. [00:34:20] Speaker A: Et donc, répercutée par la presse internationale, parce que la presse internationale, où est-ce qu'elle loge, elle? C'est aux ambassades. Donc, ce que la presse internationale fait, c'est de relayer, en se donnant l'air d'être dans l'action, mais en logeant dans des endroits sécurisés que sont les ambassades. [00:34:46] Speaker B: – Symbolique. [00:34:47] Speaker A: – C'est ça. Ce qu'elle fait, c'est qu'elle relaie les discours officiels. [00:34:53] Speaker B: – Oui, oui, c'est ça. [00:34:54] Speaker A: Et donc... – Elle relaie donc la propagande. [00:34:56] Speaker B: – Bien oui. Et si la police, la sécurité a été débarquée, Charles Cescu gagne, neutralise... Très peu de monde, il y a une quinzaine de personnes dans la pièce, c'est pas très compliqué à neutraliser. [00:35:06] Speaker A: – Dans la pièce, tu parles à la télé, là. ou au procès. [00:35:09] Speaker B: Tu sais, il n'y a pas des dizaines de milliers de personnes dans notre ville, il y a 14 personnes. [00:35:13] Speaker A: C'est pour ça qu'ils sont stressés. [00:35:15] Speaker B: Mais oui, parce que c'est une question de temps. [00:35:16] Speaker A: Ils sont intensément stressés. [00:35:18] Speaker B: Et c'est pour ça qu'il faut que ça dure une heure maximum, parce que sinon, ça pourrait tout s'effondre. Et là, on peut facilement imaginer un tout autre discours qui vient à briser ce qui s'est passé, qui était le discours un peu de Ceausescu, qui dit, bien, il y a des agitateurs de d'autres pays qui viennent faire le bordel en Roumanie, et on les a contrôlés, puis on les a éliminés, puis c'est terminé. Puis, comme tu le dis, la presse qui reprend les discours officiels reprennent ça, Voilà, tu sais. [00:35:49] Speaker A: -"Vogue de Navire". [00:35:50] Speaker B: Oui, oui, exact. Puis il n'aurait pas pris beaucoup de choses pour complètement changer de ma petite... Non, c'est ça. [00:35:55] Speaker A: C'est comme une fenêtre, une petite fenêtre sur la mécanique de tout ça. C'est ça qui est fascinant de ce truc. [00:36:05] Speaker B: Puis quand on prend sur soi, tu sais, puis là, je le faisais, c'était un peu cabotinage, mais tu sais, pour passer de l'obsessionnel à l'hystérique, puis je disais, imagine-toi que là, je vous déclare mari et femme, puis là, que tu... je crois fondamentalement que dans les prochaines 5, 10, 15 minutes, va se décider si t'es mariée avec ce type-là que tu connais pas ou non, selon une balance de pouvoir, là, qui est pas facile à cerner. S'il y a quelqu'un qui arrive, puis ils disent, ben non, c'est n'importe quoi, tout ça, puis alors t'as gagné. Ou quelqu'un qui arrive, il te dit, non, non, bravo, je vous reconnais. Puis là, ça vient de changer. Parce qu'après ça, ben, c'est diffusé, puis c'est officialisé, puis il y a un show, puis... [00:36:44] Speaker A: Ce qui est fascinant, c'est que cette balance de pouvoir-là, ce dont elle dépend beaucoup, beaucoup, c'est de comment on pense que le discours d'un ou de l'autre est soutenu par beaucoup de gens ou pas. [00:37:04] Speaker B: Oui. Et que certains de ces gens-là aient un certain saut t'sais, d'une notoriété, de quelque chose... Il y a plein de monde qui peuvent dire plein de trucs, mais si ça vient de l'Organisation mondiale de la santé, on dit bon, OK, ça vient de l'agence France-Presse, bon, OK, parfait, c'est. [00:37:24] Speaker A: Plus... Ça, c'est vrai. [00:37:25] Speaker B: Ça, c'est plus n'importe quoi. [00:37:26] Speaker A: Ça, c'est du vrai monde. [00:37:28] Speaker B: Jusqu'à temps, par contre, que ça change, puis que tu te rendes compte que finalement... [00:37:32] Speaker A: C'est ça. [00:37:33] Speaker B: ... ils faisaient juste dire quelque chose qui était faux, puis... Ou que soi-même, t'sais, on voit ça des fois, ils changent d'idée, puis quelques années plus tard, ils disent le contraire. [00:37:43] Speaker A: Puis il se trouve des gens pour soutenir, bec et ongle, une opinion et son contraire, sans souci de la cohérence de l'opinion elle-même. parce que le but, c'est de soutenir la crédibilité de l'organisation dont l'opinion émane. Et de ces gens-là, qui se trouvent à soutenir bec et ombre l'opinion d'une organisation, il se trouve des gens de la presse. Je pense que c'est ma marotte, je reviens tout le temps à ça. En tout cas, il faut absolument pas rentrer dans toute cette histoire-là de pandémie, par exemple, parce que là, on est en 2021. On est au début de la quatrième vague d'une pandémie qui dure depuis un an et demi. Le début de la quatrième vague, ce que ça a l'air de vouloir dire, c'est que tous les vaccins que tout le monde a eu, ça sert à rien, mais ça a l'air que les gens ne se rendent pas compte qu'ils se sont fait vacciner pour rien en regard du discours officiel qui vient d'on ne sait trop où, en fait. Tu as eu, au début de la pandémie, une sorte de moratoire ou d'interdit qui a été placé sur les hypothèses au sujet de la provenance du virus dont on parle, d'un moratoire qui a été placé au motif que l'Organisation mondiale de la santé, qui est un organisme qui aurait été, jusqu'à il n'y a pas si longtemps, comme réputé comme étant au-delà de tout soupçon, mais dont on se rend compte que Guetti rayé est traversé par toutes sortes d'enjeux politiques et de pression de toutes parts. Donc l'Organisation mondiale de la santé a décrété qu'il connaissait, qu'elle connaissait la cause. Tu sais, un pangolin avec... Excuse-moi. Excuse-moi, mais à sa face même, c'est absurde. Un pangolin avec une chauve-souris. Alors que c'est à un coin de rue, dans un laboratoire. OK, sérieusement, on peut-tu être sérieux un peu? Mais ça a l'air que non, on ne peut plus être sérieux. On doit absolument obéir à des opinions qui sont émises d'un tel endroit, car il en va de la crédibilité de cet endroit-là. Et si cet endroit-là perdait sa crédibilité, ce serait la fin des temps. Ce serait l'équivalent de ce qu'on disait la dernière fois que personne... tout le monde arrête de reconnaître la valeur d'un 20 $. Si tout le monde se dit 20 $, c'est quoi? C'est juste un morceau de papier. C'est la fin des temps. [00:40:39] Speaker B: Oui, c'est assez fragile. [00:40:40] Speaker A: Si tout le monde se dit, c'est quoi ça? Ça s'appelle Mondial de la santé, mais c'est comme sujet à toutes sortes d'influences de compagnies pharmaceutiques, de politiques, de machins, des influences énormes, des pressions énormes de toutes parts. La parole qui émane de cet organisme-là dépend en grande partie de la force de caractère de son dirigeant, de son représentant. Des gens qui ont une force de caractère assez grande pour résister à toutes les pressions et garder la tête froide en ce qui a trait aux faits, c'est rare. Il y a toutes les chances qu'à la tête de l'Organisation mondiale de la santé, il y a quelqu'un qui est comme en train de craquer sous toutes les pressions et donc ce qui émane de ça, est suspect, pas parce que la personne est méchante, mais est suspect parce qu'il y a tellement de champs d'influence. Est-ce que c'est Ceausescu, est-ce que c'est Idiescu qui a le vrai narratif? C'est quoi la vraie histoire de la Révolution roumaine? [00:41:52] Speaker B: Oui, puis est-ce qu'il y a eu des forces extérieures qui, à un moment donné, se sont dites Ben, il se passe quelque chose là. On a toujours voulu faire tomber la Roumanie. On va en profiter. Ou qui ont initié l'affaire. Tu sais, c'est pas si simple à trancher de qui a initié, qui a poursuivi. [00:42:08] Speaker A: Et est-ce qu'on a des organes de presse qui savent garder la tête assez froide pour tenir une distance critique nécessaire par rapport à tout le flux d'informations qu'on garroche dans leur sens pour essayer de faire valoir son propre récit. Est-ce que... Parce que ça aussi, c'est-à-dire, est-ce que... L'accès au pouvoir, par exemple, ce qui a l'air de caractériser beaucoup de journalistes, c'est-à-dire, tu veux préserver ton accès au pouvoir et donc, par conséquent, il y a un certain nombre de choses ou un certain nombre de questions ou un certain nombre de réflexions que tu t'abstiens de faire parce que tu veux pas flatter le pouvoir auquel tu espères avoir accès dans le mauvais sens, du poil. C'est juste qu'à force de le faire, est-ce que tu perds pas ton esprit critique par rapport à l'information que ton accès au pouvoir te donne? Tu sais, est-ce que tu finis pas par confondre le PR qu'on essaie de te faire passer avec des faits spéciaux auxquels toi, t'as accès? Tu sais? [00:43:28] Speaker B: Oui, oui, tout à fait. Puis tu vois, dans le cas qui nous occupe de la Roumanie, cinq ans après la... révolution, le décès de Ceausescu, les sondages. Mais elle est encore là. [00:43:42] Speaker A: Qui fait les sondages et comment? C'est quoi les questions? À qui passent les questions? [00:43:50] Speaker B: C'est ça. Tout ça n'est pas sans intérêt. Nonobstant ce fait-là, avec ce qu'on sait, il y a à peu près 50% des gens en Roumanie qui pensaient que c'était une réelle révolution, donc, de l'interne, du peuple, en guillemets. Une trentaine de pourcents qui pensaient, 30% c'est beaucoup, qui pensaient que c'était juste des manigances dans le clan autour de Ceausescu. Et 15-16% qui pensaient que c'était des forces externes, dont d'autres pays, qui a voulu faire tomber le régime pour leur propre fin. Donc, c'est un 30 plus 16, 46. Je ne sais pas c'est quoi les 4 autres pour cent. Mais bref, c'est très, très, très mitigé si c'était une vraie révolution ou non. Puis probablement que ce n'est pas juste qu'il y a une multiréponse. Probablement qu'à un moment donné, il y a des gens qui sont accrochés au fur et à mesure. Tu sais, donc, entre autres, c'est une autre question, là, mais... Tu sais, comment des gens proches du pouvoir, depuis des décennies, soudainement, se sont comme refaits une image... [00:44:53] Speaker A: Une virginité. [00:44:54] Speaker B: Oui, de contre le régime. [00:44:58] Speaker A: Oui! [00:44:58] Speaker B: Puis là, on sent comme par une twist de l'esprit, ils ont réussi à se retrouver... Oui. Un très bon positionnement de pouvoir et d'argent et tout ça, tu sais. Ça arrive, là, c'est sûr. [00:45:09] Speaker A: Et ce sera peut-être pas aujourd'hui, mais il va falloir qu'on en parle, si tu veux mon humble avis, j'aimerais beaucoup ça. En tout cas, de la psychologie des masses, pas de la psychologie collective. Là, juste pour le plaisir, j'ai ressorti un vieux livre de notre amie Freud, un texte qui s'appelait à l'époque, un texte qui date de 100 ans, 1921, « Psychologie des foules et analyse du moi ». Puis je me suis rendu compte, en fouillant un petit peu, là, qu'il a été rebaptisé comme le reste. Tout est... Ça aussi, le langage, comment le langage évolue, qui prend le contrôle du langage, qui impose, essaie d'imposer une façon de parler aux gens. Le titre de l'essai, c'était « Psychologie des foules et analyse du moi ». Il faudrait que je le relise, j'ai pas eu le temps encore. Ça a évolué. Là, t'as... Ça s'appelle maintenant psychologie collective et analyse du moi. En tout cas, peu importe. Je voulais retourner voir l'ami Freud juste parce que ça, la psychologie des foules, il me semble que c'est aussi une dimension de l'affaire. [00:46:22] Speaker B: Mais tout à fait. Puis ça, ça vaudrait la peine parce que c'est... c'est un facteur qui est pas négligeable dans toute l'histoire de comment... Puis l'exemple que tu donnes, je pense pas que t'en as parlé, Tu sais, c'est la personne, tu me disais, qui est dans la foule en Roumanie. Parce qu'en Roumanie, il y a ça, il y a des membres de la sécurité qui se promènent tout partout. Tu n'as pas le choix de chanter ce qu'il faut chanter et d'applaudir. Parce que de l'extérieur, les gens étaient quand même pas mal... [00:46:49] Speaker A: Mais dans les documentaires, c'est ce qu'on dit, il était extrêmement populaire. [00:46:55] Speaker B: Mais il l'était aussi. [00:46:57] Speaker A: Mais on ne le sait pas. Quand personne n'a le droit de penser et le droit de dire son opinion, on ne le sait pas. Mais bon, il y avait beaucoup de monde à ces rassemblements. [00:47:10] Speaker B: Mais tu sais l'exemple que tu donnes de la personne qui ne veut pas participer, mais qui sent quasiment que son corps est embarqué dans le mouvement de la foule? [00:47:19] Speaker A: C'est excellent comment il raconte. Puis c'est vraiment, t'sais, des gens comme ça, c'est admirable. Des gens qui se sont regardés faire ce qu'ils faisaient et se demandent, voyons, qu'est-ce qui m'a pris de faire ce que j'ai fait, là? C'est précieux, t'sais. Fait que lui, il est dans la foule. C'est un auteur roumain, un journaliste, un auteur. Il est dans la foule, puis il se dit... Il raconte comme ça, il dit, je voulais... je m'étais dit que je ne sortirais pas les mains de ma poche. Là, c'était une manifestation, Nicolai Ceausescu allait se promener devant la foule. Les gens étaient de plus en plus exaltés. Il dit, moi, je m'étais juré que je sortirais pas les mains de mes poches. Je ne voulais pas sortir les mains de mes poches. J'avais mes mains dans mes poches. Puis là, je me suis comme progressivement sentie de plus en plus happée par l'électricité de la foule, comme si quelqu'un qui était plus grand que Dieu allait marcher devant moi. Puis éventuellement, sans que je le veuille, mes mains sont sorties toutes seules de mes poches et je me suis mise à applaudir. C'est comme un dissident dans sa tête qui est en train d'applaudir. celui contre qui est en dissidence. Puis il applaudit dans une excitation, comme on l'est devant la face de Dieu, genre. Puis il dit, le pire de tout ça, c'est qu'il y a des gens dans la foule qui m'encourageaient dans ce sens-là. Puis la façon qu'il raconte, c'est qu'il raconte comme s'il était lui-même épaté de qu'est-ce qui s'est passé en lui. Regarde, je vais te raconter quelque chose dont tu vas te rappeler sans doute. Donc, on a organisé en 1999 un colloque qui s'appelait Variations sur le thème de l'inconscient ou l'inconscient, vu par cinq psychanalystes ou cinq personnes qui faisaient oeuvre, qui œuvraient autour de la psychanalyse. Notre but, c'était, donc c'était avec le Sénat du fil d'Ariane, et notre but, c'était de solliciter des conférenciers à parler de leur expérience réelle. Au-delà des théories et de blabla et de l'esthétique psychanalytique, c'était de parler de comment réellement, qu'est-ce que pour eux ça a été l'expérience de la psychanalyse. [00:50:06] Speaker B: Et où la rencontre dans l'inconscient. [00:50:08] Speaker A: Ou la rencontre de l'inconscient. Alors, c'était au studio Théâtre Alfred-Laliberté à Lucarne, qui est organisé comme une sorte de fosse. La scène est en bas, autour, c'est comme dans une... un quart de... un trois-quarts de lune, les spectateurs regardent en bas dans la fosse, Et là, c'est la scène et c'est là que ça se passe. Et donc, un certain nombre de conférenciers et une des conférencières, donc Irène Bleton, décide d'orienter sa conférence sur un mode conflictuel, c'est-à-dire qu'elle prend notre argumentaire. On s'appelait le Sénac du fil d'Ariane à l'époque. Elle prend notre argumentaire et elle le déconstruit à la manière poststructuralistico-psychanalytico-machin, c'est-à-dire elle, elle est en position de pouvoir interpréter chacune des phrases, donc elle nous interprète publiquement et ça crée un malaise dans la salle où il fait assez noir. Ça crée un malaise dans la salle. Elle se joue de nous, dans le fond. Elle se moque de nous en nous interprétant à sa façon. Et il y a une psychanalyste belge dans la salle qui, éventuellement, hurle. C'est un scandale. Et de l'autre côté, il y a un gars qui se lève puis qui hurle. Un gars qui lui hurle à elle, qui vient dire que c'est un scandale. Il y avait quelque chose d'une grande intensité qui se passait là. Au terme de ça, quand il est arrivé à la table ronde, ce gars-là s'est levé, est allé au micro, puis il a commencé en disant « Je suis vraiment désolée. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je ne sais pas ce qui m'est arrivé. Je m'excuse à madame, je m'excuse à tout le monde d'avoir dit ce que j'ai dit. Je ne comprends pas ce qui s'est passé. » Je trouve que c'est la même affaire que le gars qui est là, il se dit, j'ai les mains dans mes poches puis je me dis dans ma tête, je me dis... Sors pas les mains de tes poches. T'sais, tout le monde applaudit. Charles Chescault arrive. Charles Chescault va marcher. Tout le monde applaudit. Sors pas les mains de ta poche. La sécurité, tout ça, peu importe. Ton acte de dissidence à toi, ça va être de ne pas applaudir. Puis qui, finalement, par une espèce d'enchantement qui est pas capable de comprendre lui-même, voit ses mains sortir de ses poches sans sa volonté et se mettre à applaudir. parce que quelqu'un, comme il dit, quelqu'un qui est plus grand que Dieu, tu as le sentiment d'être dans quelque chose qui te dépense, te fait sortir tes mains de tes poches et applaudir malgré toi. Et le pire, dit-il, c'est qu'il y avait du monde autour qui me félicitait. Moi, je trouve que c'est un phénomène fascinant. [00:53:28] Speaker B: Tout à fait. Mais il faudrait effectivement en reparler de l'effet de foule parce que le fait d'avoir des choses qui se disent, qui se répètent et qui se chantent. dans une foule de monde a un effet performatif sur ce qui est cru et pensé. C'est fort à voir parfois. Et ça explique plein d'affaires. Un des fois, ça explique pourquoi, dans tel moment dans l'histoire, tel peuple ou tel groupe de gens ont fait telle chose. Ça n'a aucun sens, mais il y avait un contexte et il y avait un effet de groupe et un effet de foule qui est très, très fort. Tantôt, on disait... On le caricature un peu, mais en même temps, pas tant. Dans le procès de Ceausescu, tu as 15 personnes qui ont une mission de faire un simulacre de procès qui va durer une heure, puis qui vont l'exécuter. Lui qui s'oppose à leur autorité, puis on ne sait pas trop vers où la balance du pouvoir va aller, dépendamment de qui arrive pendant le procès. Comme on disait, si la sécurité arrive du côté de Ceausescu, ça peut tout s'écrouler. Il y a ça, mais il y a aussi, tu sais, par la suite, qui en parle? Puis est-ce qu'à un moment donné, il y a un nombre critique de gens qui adoptent un point de vue et un narratif? Et là, à cause de ça, bien, pour un temps qui, des fois, est... Tu sais, l'ordre du monde n'est pas très long, mais qui, pour ceux qui le vivent, est très long. Des fois, c'est 2, 3, 4, 5, 10, 15 ans. C'est quelque chose qui l'emporte. C'est comme, là, c'est terminé. On a... [00:55:02] Speaker A: On a décidé que c'était ça. C'est comme ça. C'est comme ça qu'on le racontait. [00:55:07] Speaker B: Puis à un moment donné, ça ouvre, puis là, quelqu'un qui revient, puis il y a assez de temps qui s'est passé pour dire, bien, c'est pas ça du tout qui s'est passé. Puis là, ça peut être accepté. Ah, bien oui, c'est intéressant. Il faut le remettre en question. Mais il suffit qu'à un moment donné, il y ait une masse critique de monde ou une foule en nombre suffisant pour dire, bien là, OK, là, les gens sont embarqués, puis bien, c'est la nature humaine. On a décidé de ce que c'était, puis on passe à d'autres choses. [00:55:31] Speaker A: Dans le fil des recherches qui ont mené à ce podcast et au précédent, en particulier celui-ci, je suis tombée sur une chaîne YouTube qui s'appelle Fouloscopie. fait que le gars, il a fait une thèse de doctorat sur la logique des foules. Précisément, je ne sais pas c'est quoi, il faudrait que je me procure son livre qui s'appelle Fouloscopie. Le livre Fouloscopie, l'expression elle-même, il l'a prise d'une bande dessinée où quelqu'un parlait de fouloscopie et il s'est dit, ah, c'est ça que je fais. parce qu'il n'arrivait pas à nommer sa spécialité à lui. Puis il dit, en fait, l'étude des foules, c'est ça que je fais, l'étude des foules, je ne suis pas certain dans quel champ d'étude ça se situe. Est-ce que c'est de l'éthologie? En partie, oui, parce qu'on se rend compte que les moutons, par exemple, il y a des recherches sur des troupeaux de moutons, comment... Tu vas entraîner, par exemple, tu vas... Tu vas entraîner un mouton, un seul mouton, à penser que là, la soupe est chaude quand il ressent une vibration dans son cou ou... Tu sais, et t'accrocher à un appareil. Ça fait que tu fais vibrer l'appareil et ce mouton-là, ce seul mouton-là dans tout le troupeau, pense que ça veut dire la soupe est chaude puis que c'est l'heure de manger, fait qu'il va se garrocher à une place où là, il y a de la bouffe. Parce que lui se garroche à une place, si tu le places au milieu d'un troupeau, bien, tout le troupeau se met à courir avec lui. Sans savoir pourquoi. Lui, il sait pourquoi. La vibration veut dire miam, miam. Les autres, ils n'ont aucune idée, le voient courir lui et ils se mettent à courir. Donc, il dit, ce gars-là, il dit, en partie, l'étude des foules, c'est de l'éthologie animale. Mais c'est aussi de la physique. Ceux qui étudient le mieux les foules et les mouvements de foule, c'est des physiciens. En tout cas, pour en parler, ce serait intéressant d'en parler à un prochain podcast parce qu'il y a énormément de choses à dire. Par exemple, sur cette foule-là face à laquelle Ceausescu s'est retrouvé le 22, le 21 décembre 1989, qui était une foule semblable à toutes les foules qu'il a vues dans sa vie et que sa femme... Mais quand tu les vois au début, ils sont installés et confortables et ils récoltent l'énergie de la foule, tu sais? Et ils sont super à l'aise avec ça, jusqu'au moment où, dans le coin droit, il se met à y avoir du grabuge. Et là, c'est pas normal qu'il y ait du grabuge dans sa foule. Et ça devient inquiétant, d'où le « allô, allô, calmez-vous, calmez-vous » et sa femme, voyons, c'est de la provocation et ainsi de suite, eux sur leur tribune. Mais ce qui est inquiétant, c'est que l'énergie de la foule est à risque. de s'inverser à cause du grabuge qu'il. [00:59:02] Speaker B: Y a de son côté droit. C'est vraiment comme le courant dans une piscine à un moment donné. [00:59:05] Speaker A: Oui. [00:59:05] Speaker B: Oui, oui. Mais ça a été déclenché par des mots quand même, hein, parce que, tu sais, quand il dit ce qui s'est passé à Timisoara, c'est des agitateurs, c'est des gens de l'extérieur qui... Oui. C'est ça qui a provoqué ce mouvement de foule-là qui, après, a son impact. [00:59:20] Speaker A: Bien, t'as un gars dans un des documentaires qui dit... mes mains, c'est comme l'autre, mes mains se sont mis autour de ma bouche en porte-voix et j'ai crié « mort aux tyrans, mort à Ceausescu ». Et autour de moi, les gens ont commencé à paniquer et il y a des gens qui ont été piétinés dans le mouvement de foule. ce qu'il raconte, il n'a pas besoin de raconter plus et il ne le fait pas, mais ce qu'il raconte, c'est que les mots qu'il a osé dire alors qu'il était au milieu d'une foule ont eu l'effet de disloquer. [01:00:06] Speaker B: La foule. Et aussi, nonobstant le fait, je ne sais pas ce que tu en penses, mais potentiellement qu'il y avait des gens, dont peut-être lui, qui commençaient à se représenter leur position comme étant celle du révolutionnaire. Mais pour ça, il fallait que le mot révolution existe. Il fallait qu'il y ait ce positionnement-là qui existe. Puis à partir du moment où tu t'identifies à ce qu'il représente et que tu veux en faire partie, et peut-être d'en être un porte-parole, ça aussi, ça a un impact, mais c'est des mots. [01:00:42] Speaker A: Oui, c'est des mots aussi. C'est hallucinant de voir des mots. C'est fort, les mots. [01:00:46] Speaker B: Puis peut-être c'est naïf de le dire, mais... Puis c'est un... On conclut, fait qu'on peut peut-être faire une couple de discrétions en concluant, mais, tu sais, il y avait Pierre Falardeau, à un moment donné, que moi, j'aime beaucoup, qui racontait, tu sais, en début de sa carrière, que... Lui, tu sais, c'était un gars, il n'y avait pas tellement de désir de réussir d'une façon moïque, tu sais, d'avoir des trophées ou d'avoir des belles positions, mais il écrivait des trucs qu'il pensait. Il écrivait ce qu'il écrivait, en fait, comme il pensait, tu sais. Puis, bien, il se forçait pour bien écrire, puis à chaque fois qu'il soumettait ses textes à des journaux dont le devoir, il se faisait refuser. On peut penser... [01:01:28] Speaker A: Tu m'étonnes. [01:01:29] Speaker B: Oui, mais quand même, il ne comprenait pas toujours pourquoi, parce que lui, c'était bien dit, c'était bien écrit, puis à un moment donné, il y a quelqu'un qui lui a fait le commentaire en disant «Oui, mais tu sais, toi, tu as un style très pamphlétaire. Tu es un pamphlétaire. Puis le devoir ne publie pas ça. C'est pas ça dans la ligne éditoriale. Mais lui, il savait pas c'était quoi ça. Là, il a lu, c'est quoi un pamphletable. Ah ok, mais là, il a compris que c'est quelqu'un qui pouvait être délibérément provocateur. Ce qui était naturellement, tu sais, il écrivait des trucs, Pierre Falardeau, dans un esprit de provocation, mais dans un esprit aussi de faire image. dans toute une logique de pamphlettaire, qui se tenait dans cette construction-là, mais si tu es à l'extérieur de ça, tu te dis, non, tu ne peux pas dire ça, ça ne marche pas, ça ne se fait pas. Quand il a compris ça, que ça existait, il a pu trouver une façon de s'inscrire dans quelque chose. En fait, tu vas me dire, ce n'est pas vraiment ce qu'on me parlait, mais c'est un peu ça des fois. Je peux penser qu'il y a du monde qui n'aurait pas été capable de briser les taux en Roumanie dans lesquels il était s'il n'y avait pas eu un moment donné l'idée qui se basait que ça existait, la révolution, puis que tu pouvais en faire partie, puis qu'il y avait des représentants de ça. [01:02:41] Speaker A: Surtout que, surtout que, en fait, c'est la révolution contre la révolution. C'est un peu comme ce qui se passe à Cuba en ce moment. C'est-à-dire que ce que t'as à Cuba, c'est... un pouvoir révolutionnaire. Puis t'as toute une conceptualisation sur la nécessité de la révolution permanente, par exemple. T'sais, t'as un parti... C'est au Mexique? C'est-tu au Mexique? Le Parti révolutionnaire institutionnel. Le PRI. C'est un parti révolutionnaire institutionnel. Let that sink in. [01:03:23] Speaker B: Oui, quand même. [01:03:24] Speaker A: Oui, c'est ça. [01:03:27] Speaker B: C'est la révolution intégrée au système. [01:03:33] Speaker A: Tu sais, l'idée c'est que tu vas t'accaparer la révolution. [01:03:36] Speaker B: C'est comme le nouveau parti démocratique qui existe depuis 60 ans. [01:03:39] Speaker A: Oui, tout à fait. Mais l'idée c'est que tu vas t'accaparer ce que tu peux t'accaparer de cette énergie-là populaire que certains ont été capables de récolter. Tu sais, comme on récolte des semences, là. Tu sais, comme on récolte du blé, là. Tu... Tu sais... Tu sèmes l'amertume ou tu sèmes... C'est comme Jiang Qing. Il faudrait en parler, la femme de Mao Zedong, tu sais. Tu sèmes la colère ou tu tapes into, tu sais. Tu te branches... Donald Trump, tu te branches à l'amertume ou à des doléances légitimes. [01:04:21] Speaker B: Un sentiment d'être négligé puis méprisé. [01:04:24] Speaker A: C'est ça. [01:04:26] Speaker B: En parlant de... Écoute-moi. Je te jure. [01:04:38] Speaker A: En. [01:04:42] Speaker B: Conclusion, je pense qu'il y a différentes lignes directrices dans ce dont on discute. C'est naïf un peu comme position, mais c'est toujours d'être ébahis par ce qui est dit, ce qui n'est pas dit, le pouvoir du discours, le pouvoir performatif d'un discours, qu'il y a des mots prennent un statut de vérité parce que plein de gens décident de le croire, ou que seulement certaines gens, mais avec des positions symboliques qui sont reconnues, décident de le coopter. Tu sais, tout ça, ça vient quand même avoir un impact épouvantable sur ce que les patients racontent, sur ce qu'on vit, sur la position de la vie. Puis ça m'est arrivé cette semaine. Ça fait que, tu sais, on peut conclure avec ça. Tu sais, il y a toute une industrie sur... les voyages, en fait. Il y a toute une industrie de touristes, d'être plein de places à aller. Puis Houellebecq a écrit plein de trucs là-dessus, sur toute l'industrie du tourisme. Puis à un certain âge, il y a des gens qui décident, qui vont consacrer leur vie à voyager un peu partout. Puis il y a des 4 étoiles puis des 5 étoiles. Puis il y a des gens qui s'emmerdent à voyager, mais ils font pareil parce qu'ils pensent que c'est ça qu'il faut faire. En fait, j'ai un aparté, avant de dire ce qui est déjà un aparté. Ça fait que j'assume la multiplication des dérives. [01:06:03] Speaker A: D'aparté, d'aparté. [01:06:04] Speaker B: Il y avait un animateur de radio, je te parlais tantôt, Roger Drelet, qui était à CKVL, que j'écoutais quand j'avais 20 ans, il y a 30 ans, qui organisait des voyages en Italie, entre autres, avec ses auditeurs. Ça fait qu'à un moment donné, il disait, telle date, on part en Italie, ça vous intéresse, avec tel organisme de voyage, tout ça. Puis il a fait ça pendant des années et des années. Puis à un moment donné, il a été interviewé par un intervieweur qui s'appelait le fameux Pierre Marcotte, qui était l'animateur des Tannhans, dans le temps. Puis Pierre Marcotte, lui, il était... parce qu'il était tout à fait correct, il voulait faire une belle entrevue, sympathique. Puis il lui avait dit... C'est beau aussi, hein, Roger? Ça fait des années que tu fais des voyages avec tes auditeurs en Italie, puis tout ça. Vraiment dans l'idée d'être sympathique, puis de prendre quelque chose au bon, puis de faire une entrevue bon enfant. Pierre-Roger Drolet, il avait dit, ouais, mais... Il y a beaucoup de paraître dans les voyages. Les gens voyagent pour dire qu'ils ont voyagé, mais dans le fond, ils ne savent pas ce qu'ils voient. Et là, il dit « Non, mais quand même, Roger, c'est l'Italie, c'est beau. » Ou alors, il dit tellement d'autres qui voyagent, mais finalement, ils restent dans leur hôtel et tu les amènes à n'importe où. Il y avait complètement d'effets. [01:07:14] Speaker A: Le mythe. [01:07:16] Speaker B: Le mythe, mais puis tu voyais vraiment, de mon souvenir, Pierre-Marc, quand t'étais légitimement débalancé, je me disais, attends, mais voyons, Roger, c'est quand même beau. Tu peux pas dire ça, Roger. Le voyage, c'est quand même quelque chose de beau, tu sais. Non, non, il y a beaucoup de bagues. C'était mon expression à Roger Drogat, tu sais. Le bague, c'est d'être dans le discours courant, puis suivre les modes, mais finalement, il n'y avait pas de contenu, tu sais. Non, non, il y a beaucoup, je n'y fais pas beaucoup, mais il y a beaucoup de bagues dans le monde. Il y a des couples qui voyagent parce qu'ils s'ennuient, mais ils n'en tirent à rien. Puis tu pourrais les amener sur le boulevard. [01:07:49] Speaker A: T'as chaud. [01:07:50] Speaker B: T'as chaud, ça serait pareil. [01:07:51] Speaker A: Puis souvent, il y en a un roger. [01:07:52] Speaker B: Mais bref, donc, ça m'a fait penser à ça. La citation suivante de Samuel Beckett que je lisais. Parce que moi, ça a une place dans ma vie, le touriste, le voyage, l'importance de voyager. Il y a beaucoup de gens qui y croient, et que si tu le dis, moi, je ne voyage pas, comme un positionnement, ils vont dire, mais voyons, tu n'es pas très cultivé, ce n'est pas fort. Samuel Beckett, à un moment donné, il dit, il y a la citation suivante qui est très connue de sa part, il dit, je paraphrase, mais essentiellement, c'est, on est peut-être con, je l'admets, on est peut-être con, mais pas au point de penser qu'on peut voyager pour le plaisir. Tu sais, c'est comme un truc... Tu parlais, en fait, c'est ça mon lien, de dissonance cognitive. Tu sais, des fois t'entends quelque chose qui vient tout défaire. tout un échafaudage de discours qui existe sur le tourisme et l'importance de voyager. Puis ça vient tout de retourner d'un coup. [01:08:45] Speaker A: Oui. [01:08:45] Speaker B: Tout d'un bord. [01:08:46] Speaker A: Oui. [01:08:46] Speaker B: Puis ça se pourrait qu'à un moment donné, dans pas si longtemps, ça se pourrait tout à fait pour d'autres raisons, là, mais qu'il y ait plein, plein de gens qui décident qu'effectivement, les voyages, à cause de l'environnement, c'est mal, puis qu'il y ait plus personne qui voyage, puis que cette mode-là, qui va avoir duré un temps, tu sais, quelques décennies, en fait, parce qu'on voyageait pas tant. [01:09:07] Speaker A: Les années 30, 40, là, Ça dépend de qui. [01:09:10] Speaker B: Tu sais, quand je parle du peuple, ça vient de s'effriter à part pour l'élite. [01:09:17] Speaker A: Oui. [01:09:18] Speaker B: Voilà, c'était ma dissonance cognitive de la semaine. [01:09:22] Speaker A: Mon Dieu, mon Dieu, je suis en... Ça me crée de l'angoisse. Moi, je trouve voyager, c'est bien. Pourquoi? [01:09:32] Speaker B: Tu comprends pas le regard que j'ai?

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